Lettre de Mgr Lefebvre sur le carême 1982
Lettre de Mgr Lefebvre sur le carême 1987
Consignes de Mgr Lefebvre
Commandements de l’Église
Lettre de Mgr Lefebvre sur le carême
aux fidèles de la Tradition
+ le 14 février 1982
Bien chers fidèles,
Selon une ancienne et salutaire tradition dans 1’Église, à l’occasion du Carême, je vous adresse ces quelques paroles pour vous encourager à entrer de toute votre âme dans ce temps de pénitence, avec les dispositions voulues par l’Église et dans le but pour lequel elle l’a prescrit.
Si je recherche dans les livres du début du siècle les fins pour lesquelles l’Église a prescrit ce temps de pénitence, ils en indiquent trois :
— d’abord réprimer la concupiscence de la chair
— puis faciliter l’élévation de nos âmes vers les réalités divines
— enfin satisfaire pour nos péchés.
N’est-ce pas ce dont Notre Seigneur nous montre l’exemple au cours de son existence ici-bas : prier et faire pénitence. Mais n’ayant ni concupiscence, ni péché, il a fait pénitence et satisfait pour nos péchés, nous montrant par là que notre pénitence peut être bénéfique non seulement pour nous, mais pour notre prochain.
Prier et faire pénitence. Faire pénitence pour mieux prier, pour nous approcher davantage de Dieu, voilà ce que tous les Saints ont fait, ce que la Vierge Marie rappelle dans tous ses messages.
Oserons-nous dire que cette nécessité est moins grande à notre époque qu’aux époques précédentes ? Nous pouvons et devons au contraire affirmer que jamais plus qu’aujourd’hui la prière et la pénitence sont nécessaires, parce qu’on a tout fait pour diminuer et mépriser ces deux éléments fondamentaux de la vie chrétienne.
A-t-on jamais comme aujourd’hui cherché à satisfaire sans aucune limite tous les instincts désordonnés de la chair, jusqu’à l’assassinat de millions d’innocents. On croirait de même que la société n’a de raison d’être que de donner le maximum de “standing” de vie à tous les hommes, pour leur éviter toute privation des biens matériels.
Ainsi le but de la Société serait opposé à ce que prescrit 1’Église. Et l’on comprend qu’en ces temps où les hommes d’Église s’alignent sur l’esprit du monde, on assiste à la disparition de la prière et de la pénitence, et particulièrement dans leur aspect de réparation pour les péchés, d’obtention du pardon des fautes. Qui aime aujourd’hui redire le psaume si émouvant du “Miserere” et répéter avec le psalmiste « Peccatum meum contra me est semper : mon péché est toujours devant moi » ? Et comment une âme chrétienne peut-elle éloigner la pensée du péché si l’image du crucifix est toujours devant ses yeux ?
*
Les Évêques ont demandé au Concile une diminution telle du jeûne et de l’abstinence que ces prescriptions ont pratiquement disparu. Nous devons reconnaître que cette disparition est une conséquence de l’esprit œcuménique et protestant qui nie la nécessité de notre participation pour l’application des mérites de Notre Seigneur à chacun de nous, pour la rémission de nos péchés et la restauration de notre filiation divine.
Tandis qu’autrefois les commandements de l’Église prévoyaient :
— le jeûne obligatoire pour tous les jours du Carême excepté les Dimanches, pour les jours des Quatre-temps et plusieurs vigiles
– l’abstinence pour tous les Vendredis de l’année, les Dimanches de Carême, et dans de nombreux diocèses tous les Samedis de l’année.[1]
Que reste-t-il aujourd’hui de ces prescriptions ?
– le jeûne le Mercredi des cendres et le Vendredi Saint
– l’abstinence le Mercredi des cendres et les Vendredis de Carême.
On peut se demander, pourquoi une telle diminution.
Quels sont ceux qui sont astreints au jeûne ?
— les adultes de 21 ans jusqu’à l’âge de 60 ans
Qui doit observer l’abstinence ?
— Sont astreints à l’abstinence tous les fidèles à partir de l’âge de 7 ans.
Qu’est-ce que le jeûne ? C’est ne faire qu’un repas par jour, auquel il est permis d’ajouter deux collations, une le matin et une le soir, ne dépassant pas deux onces, soit 60 g d’aliment solide.
Qu’est-ce que l’abstinence ? C’est s’abstenir de viande.
Les fidèles qui ont vraiment l’esprit de foi et qui comprennent profondément les motifs de l’Église, qui ont été indiqués ci-dessus, auront à cœur non seulement d’accomplir ces légères prescriptions d’aujourd’hui, mais entrant dans l’esprit de Notre Seigneur et de la Vierge Marie, ils porteront les péchés qu’ils ont commis et ceux de leur prochain, de leur famille, de leurs amis, de leurs concitoyens.
C’est pourquoi ils ajouteront à ces prescriptions soit le jeûne tous les Vendredis de Carême, soit l’abstinence d’alcool ou de vin, ou ils s’abstiendront de télévision. Ils s’efforceront de prier davantage, d’assister plus souvent à la Sainte Messe, de réciter le Rosaire, de ne pas manquer la prière du soir en famille. Ils se sépareront de biens superflus pour aider les Séminaires, pour fonder des écoles, pour aider leurs prêtres à l’aménagement des chapelles, pour aider le développement des maisons des religieux et des religieuses.
Les prescriptions de l’Église ne concernent pas seulement le jeûne et l’abstinence, mais encore le devoir pascal.
Voici ce que recommandait le Vicaire capitulaire de Sion aux diocésains le 20 février 1919 :
1. Pendant le Carême, Messieurs les Curés feront deux fois le chemin de la Croix chaque semaine : un jour avec les enfants des écoles, un autre jour avec les autres paroissiens. Après le chemin de la Croix, on récitera les litanies du Sacré Cœur.
2. La Semaine de la Passion, c’est-à-dire la Semaine avant le Dimanche des Rameaux, il y aura un triduum dans toutes les églises paroissiales. Instruction – Litanies du Sacré Cœur en présence du St Sacrement – Bénédiction.
Dans ces trois instructions, Messieurs les Curés rappelleront à leurs paroissiens simplement et clairement quelles sont les principales conditions pour recevoir dignement le Sacrement de pénitence.
3. Le temps pendant lequel on peut remplir le devoir pascal est fixé pour toutes les paroisses du Dimanche de la Passion au 1er Dimanche après Pâques.
Pourquoi ces directives ne seraient-elles plus valables aujourd’hui ?
Profitons de ce temps salutaire au cours duquel Notre Seigneur a coutume de dispenser d’abondantes grâces. N’imitons pas les vierges insensées qui n’ayant pas d’huile dans leur lampe trouvèrent la porte de la maison de l’époux fermée et entendirent cette terrible réponse “Nescio vos” : “Je ne vous connais pas”.
*
Bienheureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté, car le royaume des Cieux est à eux ; c’est-à-dire l’esprit de détachement des biens de ce monde.
Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés. Pensons à Jésus au jardin des oliviers qui pleura nos péchés. A nous désormais de pleurer les nôtres et ceux de nos frères.
Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la sainteté car ils seront rassasiés. La sainteté passe par la croix, la pénitence, la privation. Si vraiment nous recherchons la perfection, nous devons emprunter le chemin de la Croix.
Puissions-nous en ce Carême entendre l’appel de Jésus et Marie et nous engager à leur suite dans cette croisade de prière et de pénitence.
Que nos prières, nos supplications, nos privations obtiennent du Ciel que les responsables dans l’Église retournent à ses vraies et saintes traditions, seule solution pour que les institutions de l’Église revivent et refleurissent à nouveau.
Aimons à redire cette conclusion du “Te Deum” :
“In te Domine speravi, non confundar in aeternum” : “En vous, Seigneur, j’ai placé mon espoir, je ne serai jamais déçu.”
+ Marcel Lefebvre
Ancien Archevêque de Tulle
Fondateur de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X
Rickenbach, le 14 février 1982 Dimanche de la Sexagésime
Lettre à nos chers fidèles
à l’occasion du carême
C’était autrefois une excellente coutume que l’évêque du diocèse adressât une lettre à ses fidèles diocésains à l’approche du carême.
En effet, comme le dit l’Épître du 1er dimanche du carême : “Frères, nous vous exhortons à ne pas recevoir en vain la grâce de Dieu… C’est maintenant le temps favorable, c’est maintenant le jour du salut” (2e Cor. 6,1 à 10).
Bien chers fidèles, lisez et relisez les notes qui, dans vos anciens missels, vous présentent le temps du carême. Elles vous rappelleront l’origine et la signification de ces quarante jours de prière et de jeûne, qui nous préparent à la Semaine Sainte, au grand mystère de la Croix pour arriver à la Résurrection.
L’Église veut nous entraîner à la pratique d’une vie chrétienne plus parfaite. Elle nous montre l’exemple du Christ et par le jeûne et la pénitence nous associe à ses souffrances pour nous donner part à sa rédemption.
Tout au long de cette “sainte quarantaine” elle nous rappelle que nous sommes des pécheurs, assaillis par la concupiscence de la chair, la concupiscence des yeux et l’orgueil de cette vie, elle met sur nos lèvres des supplications émouvantes : “Seigneur ne nous traite pas selon nos péchés, ne nous châtie pas selon nos fautes… hâte-toi, préviens-nous de tes miséricordes” (Trait, Mercredi des Cendres).
Bienheureux êtes-vous, chers fidèles, qui avez gardé l’esprit de foi et qui vous disposez à cette période de prière et de pénitence avec dévotion, persuadés que vous vous sanctifierez par l’assistance plus assidue à la Sainte Messe, par la communion fréquente, par le sacrement de pénitence, par le jeûne et l’abstinence, par l’aumône, par une plus grande pratique des vertus chrétiennes l’humilité, la douceur, la patience, la bonté, la mansuétude ; et, si possible par une sainte retraite, qui vous éloignera du péché, de l’attachement à ce monde pour trouver l’intimité de l’amour de Jésus et de Marie et ainsi transformer votre vie.
Mais pour croire à cette reviviscence de la grâce dans les âmes, il faut avoir non seulement la foi, mais l’esprit de foi, c’est-à-dire une foi vive animée de l’Esprit Saint, qui entraîne nos âmes dans la voie de la perfection, dans une charité toujours plus grande envers Dieu et envers le prochain.
Or nous constatons que l’esprit de foi qui croît et vit de la grâce du baptême a disparu dans les milieux les plus élevés de la hiérarchie, les principes qui orientent et dirigent l’esprit du pape et des évêques ne sont plus les principes de la foi, mais les principes de la raison désordonnée, comme ceux qui sont à l’origine du libéralisme protestant, du modernisme, de l’américanisme et du sillonisme, autant de principes qui ont été condamnés par le concile de Trente et tous les papes jusqu’à Pie XII inclusivement.
Les derniers papes ont rejeté l’héritage de vingt siècles de l’Église pour se faire les héritiers des libéraux et des modernistes. Tout ce qu’ils disent ou ce qu’ils font n’est que l’écho de ce qui a été dit et fait par ceux qui depuis quatre siècles sont imbus de ces faux principes. Assise est le fruit le plus parfait du catholicisme libéral condamné par tous les papes qui ont précédé Vatican II.
Nous nous trouvons donc affrontés à un monde ecclésiastique en pleine incohérence, en plein illogisme, cherchant des compromis entre la Vérité et l’erreur, le Bien et le mal, la Lumière et les ténèbres, Dieu et Bélial.
Cet ébranlement de la foi semble bien préparer l’Antéchrist, selon les prédictions de saint Paul aux Thessaloniciens et selon les commentaires des Pères de l’Église.
Lorsque Notre Seigneur décrit la fin des temps, et à Sa suite les apôtres dans leurs lettres, ils s’adressent à ceux qui demeureront fidèles en leur disant Vigilate, vigilate. Veillez et soyez prêts. “Ainsi donc, frères, dit saint Paul, demeurez fermes et gardez les enseignements que vous avez reçus…”
“Cependant le jour du Seigneur viendra comme un voleur, dit saint Pierre, dans sa deuxième épître, en ces jours les cieux passeront avec fracas… la terre sera consumée… Dans cette attente, bien aimés, faites tous vos efforts, afin d’être trouvés par Lui sans tache et irréprochables dans la paix”.
Que nos prières et nos jeûnes soient donc pour nous une source de sanctification, et une supplication pour le retour des pasteurs à la Vérité du Magistère traditionnel de l’Église pour l’honneur de Notre Seigneur, pour son règne universel et pour le règne de Marie, sa Sainte Mère.
+ Marcel LEFEBVRF
Arch. Evèque émérite de Tulle
Fondateur de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X
Ecône, le 25 janvier 1987,
en la fête de la Conversion de St Paul.
Consignes de Mgr Lefebvre
Mgr Lefebvre publia le 1er mai 1980 un recueil de règles et de facultés pour tous les prêtres de la Fraternité Saint Pie X. On y lisait les règles suivantes que son successeur immédiat fit disparaître :
Du jeûne et de l’abstinence
– Le jeûne est à observer : le Mercredi des Cendres, le Vendredi Saint, aux Vigiles de l’immaculée Conception et de Noël, aux Quatre-temps et aux vendredis de carême.
– L’abstinence les mêmes jours, plus les vendredis de Carême.
Nous conseillons vivement d’encourager les fidèles à observer l’abstinence tous les vendredis et de jeûner les vendredis de Carême, et s’ils le peuvent d’étendre le jeûne et l’abstinence à tout le Carême et aux Quatre-Temps.
Fin des consignes de Mgr Lefebvre édictées dans les « Ordonnances ».
Commandements de l’Église
Code de droit canonique traditionnel
Canon[2] 1251 § 1 La loi du jeûne prescrit qu’il ne soit fait qu’un repas par jour ; mais elle ne défend pas de prendre un peu de nourriture matin et soir, en observant toutefois la coutume approuvée des lieux, relativement à la quantité et à la qualité des aliments.
§ 2 Il n’est pas défendu de consommer viandes et poissons au même repas ; ni de remplacer la réfection du soir par celle de midi.
Canon 1252 § 1 L’abstinence seule est prescrite les vendredis de chaque semaine.
§ 2 A la fois le jeûne et l’abstinence sont prescrits le mercredi des Cendres, les vendredis et samedis de carême, les jours des Quatre-Temps ; les vigiles de la Pentecôte, de l’Assomption, de la Toussaint et de Noël. (Pie XII transféra le jeune et l’abstinence la vigile de l’Assomption à celle de l’Immaculée Conception.)
§ 3 Le jeûne seul est prescrit tous les autres jours du Carême.
§ 4 La loi de l’abstinence, ou de l’abstinence et du jeûne, ou du jeûne seul, cesse les dimanches et les fêtes de précepte, exceptées les fêtes qui tombent en Carême ; on n’anticipe pas les vigiles ; cette loi cesse aussi le Samedi Saint à partir de midi.
Canon 1254 § 1 Sont obligés par la loi de l’abstinence tous ceux qui ont atteint sept ans révolus.
§ 2 Par la loi du jeûne, ceux qui ont accompli leur vingt et unième année et ce jusqu’au commencement de leur soixantième.
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[1] Sa mémoire a trompé Mgr Lefebvre comme le montrent les commandements de l’Église énoncés dans le code de droit canonique et rapportés ci-dessus.
[2] « Canon » est un terme ecclésiastique qu’il faut traduire par « règle ».