Sermons sur l’Église
19. La famille, les laïcs et mission de l’Église

Mes bien chers Frères,

Ce n’est pas le tout d’étudier l’Église, encore faut-il que nous entrions dans les vues de Dieu et que nous participions comme il convient à la mission de l’Église.

Au cours du sermon je résume le début de L’histoire sécrète de la Congrégation de Lyon

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Résumé du sermon

Tout chrétien est au service de l’Église

Tout dans l’Église doit être vu et fait pour le bien de toute l’Église, pour le rayonnement de la chrétienté. Les individus, les familles, ne s’épanouissent qu’en se dévouant au bien commun.

« Ayez les mêmes sentiments que le Christ Jésus. » (Saint Paul au Philippiens) Les mêmes sentiments et dans le même ordre. Le bien de l’Église en tout premier.

« Que votre règne arrive sur la terre comme au Ciel ». Or, cette prière est dite par tous les chrétiens.

L’Église est la société des amis de Jésus. Amitié = charité. Charité envers Dieu et envers le prochain.

Si l’action catholique de Pie XI est mauvaise, ce n’est pas parce que les laïcs exercent l’apostolat, mais parce que les modernistes leur font prendre la place des prêtres.

La famille et la chrétienté

La mission de la famille ne peut être différente de celle des individus qu’elle forme, ni de l’Église tout entière. Elle forme des hommes, or, un homme est au service de la chrétienté.

À Fátima, Notre Dame confie à de simples enfants ses soucis apostoliques : la conversion des pauvres pécheurs.

La famille forme des apôtres. En premier, elle forme des prêtres ; en second elle forme ceux qui feront rayonner la chrétienté, principalement par les œuvres de miséricorde.

Former des prêtres par l’amour de la Croix dès la première communion. Ne pas dire : « par la communion, Jésus est tout à toi » mais : « tu es tout à Jésus ». Ne pas dire « Jésus est dans tout cœur » mais : « Tu es dans le cœur de Jésus ».

Les œuvres de miséricorde seront le critère du jugement divin. Les œuvres de miséricorde corporelle : J’ai eu faim, j’ai eu soif, et vous m’avez secouru. Mais surtout, comme toujours, il faut donner un sens spirituel : faim et soif de Dieu et vous m’avez nourri et désaltéré par la bonne doctrine, par les bons conseils, etc.

Exemple : les béates – Les œuvres laïques de saint Vincent de Paul

Laïcs et persécution

Importance des laïcs en période de persécution. Mgr Lefebvre y revenait constamment. Les catéchistes en pays païen, les laïcs sous la Révolution.

Les Vendéens sous la Révolution – Cadoudal – Les catéchistes en Afrique, en Asie – le fondateur de l’Église de Corée – les Japonais pendant deux siècles et demi.

Voir L’histoire sécrète de la Congrégation de Lyon

Plus de paroisses, des missions : il y en eut vingt cinq pour tout le diocèse. Plus de curés, mais un prêtre, nommé par l’abbé Linsolas chef de mission, a sous ses ordres des mis­sionnaires triés sur le volet, « aucun ecclésiastique ne de­vant s’ingérer dans le ministère s’il n’est envoyé ». À chacun des missionnaires est donnée « une marque qui puisse les faire connaître et des prêtres fidèles et des Catho­liques » ; elle est communi­quée aux chefs de village pour qu’ils n’accueillent aucun prêtre qui en serait dépourvu.

Le chef de village est un laïc présenté par les missionnai­res au prêtre chef de mission, qui le nomme « l’ouvrier évangéli­que » et se repose sur lui pour diriger les fidèles. Les missionnaires nomment des catéchistes présentés par le chef de village qui a autorité sur eux.

Ils sont divisés en trois classes : les catéchistes « stables », hommes ou femmes, qui sont les véritables « gardiens des paroisses », chargés non seulement d’en­seigner la religion aux enfants, mais d’organiser la venue du missionnaire et de le tenir au courant de tout ce qui touche la vie de l’Église ;

– des catéchistes « ambulants » qui accompagnent le missionnaire, lui cherchent des retraites sûres et lui servent de courrier ;

– des catéchistes « précurseurs » qui vont dans les com­munes où la mission n’a pas encore pénétré. « Sans faire semblant de rien », ils enquêtent et préparent le terrain ; ils vont aussi étudier sur place les communes qui deman­dent pour la première fois des missionnaires.

L’abbé Linsolas, qui a vécu au Séminaire des Missions Étran­gères, dit s’être inspiré de ce qui se passe en Chine et au « Tunquin ». L’Église du silence était alors en France, sous la tyrannie de la Révolution. C’est la nuit que le mission­naire dit la messe à des heures fixées pour que chaque fidèle puisse rentrer chez lui avant le lever du soleil, « et que l’on ne s’aperçoive de rien ». L’abbé Linsolas tenait la main à l’application très stricte de la règle fondamentale : « un secret inviolable que les chefs et les catéchistes doivent garder au péril même de leur existence ». Grâce à cela, aucun des prêtres missionnaires ne fut arrêté malgré une activité intense.

Donner sa vie pour ses frères était pour tous le risque quotidien ; c’est la perfection de la charité. L’abbé Linsolas, ce grand apôtre d’un temps où la Révolution soufflait la haine, n’a cessé de rappeler, dans la ville des mitraillades, que la vérité ne pouvait prendre racine dans les âmes qu’unie à la charité. Ses instructions aux missionnaires sont une page d’évangile :

« Les missionnaires seront tenus de s’aimer entre eux comme des frères ; vis-à-vis des fidèles, ils garderont un parfait désintéres­sement, refusant toute rétribution pour les sacrements qu’ils don­nent, les servi­ces qu’ils rendent ; il serait à souhaiter qu’ils refusas­sent même ce que l’on of­fre. Ils recevront les objets qui leur seront nécessaires directe­ment plutôt que l’argent destiné à les procurer. Ils s’occuperont moins des âmes pieuses que des vrais pécheurs. Ils auront moins d’empressement à étendre leurs travaux que de soins à mériter que Dieu les agrée et les bénisse : les fruits de leur mi­nistère sont le prix du zèle, des vertus sacerdotales, surtout de l’humilité. Tous les fidè­les du canton ayant droit à leur dévoue­ment, ils célèbre­ront alternativement dans chacune des paroisses du can­ton. Ils useront des plus grands égards envers les prêtres tombés et rétractés. Après avis du pretr chef de mission, ils les emploieront en qualité de catéchistes. Ils essaieront doucement de ra­mener les prêtres encore égarés dans le schisme ; jamais ils ne parle­ront d’eux durement. »

La congrégation des demoiselles.

Avec une rare prescience de la menace que faisait peser sur l’Église la dissolution de la doctrine chrétienne en une vague phraséologie dite philosophique, analogue à celle que l’on dit aujourd’hui scientifique et qui n’est pas moins redoutable, l’abbé Linsolas avait d’abord pensé à leur donner le nom de « Demoiselles catéchistes », mais la persécution déchaînée par la Révolution, étendra bientôt à tous les besoins de l’Église leur zèle qu’elles porteront jusqu’à l’héroïsme.

Il nous les présente de sa main :

« En 1788, M. l’abbé Linsolas avait fondé une société de Demoi­selles (peu de personnes, par prudence, mais raisonnables, pieuses) ap­partenant à des familles honnêtes et chrétiennes. Il donna à ces âmes d’élite un règlement, qu’il adapta aux circonstances pénibles auxquelles il pré­sumait qu’on serait exposé dans les temps malheu­reux qu’il prévoyait. Chaque associée devait s’affilier secrètement, et sans faire connaî­tre l’association, quatre ou cinq parentes ou amies pour les porter à la pratique de la vertu principalement, à la charité effective envers le prochain. Les associées et affiliées s’oc­cupèrent, jusqu’à nouvel ordre, à édifier leur famille, à se porter mutuellement avec une sainte émula­tion à la piété et aux bonnes œuvres. Toutes les trois semaines, il y avait une assemblée pour toutes les associées, et chaque membre de cette société réunissait tous les mois les affiliées.

Depuis 1790, les affiliées et associées avaient travaillé à éloigner du schisme les personnes qu’on cherchait à sé­duire et à retirer celles qui avaient eu le malheur de s’y laisser entraîner. Pour arri­ver à cette fin, on procurait à la société plusieurs exemplaires des brochures ortho­doxes opposées aux faux principes de l’Église Constitutionnelle. Elles les faisaient lire aux personnes qu’on cher­chait à entraîner et à celles qui avaient succombé à la séduction.

La vive persécution qui s’éleva en 1793, et qui fut plus ou moins forte jusqu’en 1801, détermina M. l’abbé Lin­solas, Vicaire Général du diocèse, à utiliser en 1793 sa pe­tite société et les affiliées : à cette fin, il les divisa en trois classes.

Celles de la première allaient visiter les prêtres, les religieuses, les femmes catholiques qui étaient détenus. Elles s’informaient des be­soins de chaque prisonnier, en rendaient compte au Vicaire Gé­néral, qui y pourvoyait selon la quotité des aumônes qu’il recevait, grâce aux abondantes charités des fidèles, quoique la majorité – l’on pourrait même dire la presque totalité – des for­tunes eussent été dilapidées par les buveurs de sang, les Comités révolutionnai­res.

Dans ces distributions, l’on ne compte pas ce que les catholiques y envoyaient ou por­taient eux-mêmes. Les Demoiselles de cette classe se chargeaient, malgré le danger qu’elles couraient d’être sur­prises, arrêtées, jetées en prison, peut-être même guillo­tinées comme fanati­ques, de remettre aux prisonniers les lettres de consolation et d’encouragement que l’abbé Lin­solas leur adressait ; et les réponses lui parvenaient par la même voie dans la semaine.

Les membres composant la seconde classe visitaient à l’Hôtel-Dieu les malades de leur sexe, leur faisaient l’au­mône corporelle et spiri­tuelle, instruisaient celles qui en avaient besoin, leur procu­raient des prêtres catholiques, les leur conduisaient même. Elles eurent dans leurs fonc­tions honorables des occasions assez fré­quentes de remercier la Providence pour les conversions qui s’opéraient, d’après les instruc­tions qui leur étaient données, tant parmi les malades qui croupissaient dans le vice que parmi ceux qui étaient tombés dans le schisme.

Les associées et affiliées de la troisième classe, choi­sies parmi les plus instruites sur la religion, étaient char­gées de faire, dans divers quartiers de la ville, le caté­chisme aux jeunes filles, celles surtout qu’on pouvait dis­poser à la Première Communion. Pour rassurer les prê­tres fidèles contre la crainte d’être trompés, chaque mem­bre de cette troisième classe était muni d’une autorisation portant le sceau de Mgr de Marbœuf.

Conclusion

Il est évident que ces jeunes gens et ces jeunes filles généreux ne sont pas le fruit de M. Linsolas seulement. Le fruit a commencé à mûrir en famille. Cela nous fait comprendre ce qu’est une famille : elle forme les apôtres du règne de Notre Seigneur Jésus-Christ.