Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.
Mes bien chers Frères, cela fait plusieurs sermons où je vous invite à contempler les mystères du Christ et nous allons continuer encore, mais je pense nécessaire de nous arrêter à bien comprendre quelle est la valeur et la puissance des mystères du Christ de manière à ce que vous puissiez bien en profiter. Dom Marmion a un chapitre dans « le Christ dans ses mystères » – livre que je vous recommande particulièrement et que je peux vous fournir – intitulé « Les mystères du Christ sont nos mystères ». Voyons pour quelles raisons.
Le Christ a vécu les mystères pour nous
La première raison, c’est que le Christ les a vécus pour nous et que nous étions présents dans sa pensée au moment où il les vivait. Le Christ les a vécus pour nous, il n’avait pas besoin de descendre sur terre pour lui. Cela n’a rien ajouté à la grandeur de la divinité ! Le credo nous le dit « propter nos et propter nostram salútem » : c’est « pour nous et pour notre salut », c’est-à-dire pour nous donner la vie. Et Jésus le dit dans l’évangile « Je suis venu pour qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance ». Notre Seigneur, en descendant sur terre, veut qu’un jour nous soyons avec lui, là où il est de droit en tant que Dieu dans la gloire de son Père. Et chacun peut dire avec Saint Paul « Oui, il m’a aimé et il s’est livré pour moi. » Saint Paul ne dit pas « pour nous » mais « pour moi ».
Vous vous rappelez que je vous ai parlé de la science du Christ. Je vous ai dit qu’outre la science divine, Notre Seigneur avait la science infuse. Et cette science infuse contenait tout ce qui est relatif à sa mission. Dieu a donné à l’humanité de Jésus Christ, à son âme humaine, à son intelligence humaine, il lui a donné une connaissance de tout ce qui était relatif à sa mission. Et ce qui est relatif à sa mission, c’est nous, avec toutes les grâces qui nous sont nécessaires et par conséquent toutes les conditions dans lesquelles nous avons besoin de ces grâces pour suivre le Christ. Ce qui fait que Le Christ connaissait chacun d’entre nous, il connaissait chaque situation dans laquelle il nous donnerait des grâces. Le bon père Barrielle qui fut directeur spirituel au séminaire, et qui fut mon directeur spirituel, lorsqu’il nous prêchait sur Jésus-Christ, nous disait – notamment pour que nous méditions sur l’apparition de Jésus ressuscité à sa Mère, mais c´est valable pour toutes les scènes – « Vous mettrez dans la pièce, vous direz à Jésus ”Mon Jésus je ne vous dérange pas, je ne fais qu´observer, admirer” ». Certains séminaristes trouvaient cela enfantin, en réalité c’est parfaitement juste. Et ce que le bon père Barielle n’ajoutait pas, mais maintenant que vous avez étudié Saint Thomas vous pourriez l’ajouter, c’est que Notre Seigneur nous répond au moment où nous arrivons « Mais tu ne me gênes pas, je t’attendais. » Et nous dirions « Mais comment Seigneur vous m’attendiez ? » « Oui. Au moment où j’ai vécu tous ces mystères non seulement je t’attendais, mais c’est moi qui t’ai fait venir. J’ai vécu ces mystères pour toi, j’ai demandé à mon Père, j’ai intercédé à mon Père pour toi, et j’ai gagné dans ces mystères les grâces qui te sont nécessaires pour me suivre. Et non seulement tu ne me gênes pas, mais je désire me donner à toi. » Ce qui fait que, lorsque vous contemplez un mystère, comme tout était présent à la pensée de Jésus-Christ – je ne parle pas seulement de la pensée divine, je parle de la pensée humaine de Jésus-Christ – comme il avait connaissance de tout cela, vous étiez déjà dans le mystère, vous étiez déjà impliqué dans le mystère.
Par ses mystères, le Christ nous communique ses mérites
Vous savez que le Christ veut nous communiquer ses mérites. Tout vient de lui. C’est la volonté de Dieu que nous ayons été appelés au salut et lorsque l’homme s´est détourné du salut, c’est la volonté de Dieu de nous ramener.
Seulement, ne croyez pas que l’homme revient tout seul à Dieu par ses propres forces ! Cela suppose nécessairement un premier appel de Dieu, une première démarche de Dieu qui est offerte à tous les hommes, mais qui vient bien de Dieu, et qui est un don gratuit. Et ce don gratuit Dieu a voulu qu’il nous soit fait à travers l’incarnation de Jésus-Christ et il a voulu qu’il nous soit communiqué à travers les mystères. Il a voulu que nous recevions ces dons en nous unissant aux mystères. Saint Paul dit que nous avons été co-ensevelis avec le Christ et que nous sommes co-ressuscités avec le Christ. Co-ensevelis dans le tombeau « cumsepulti cum illo ». Et il nous a co-ressuscités, et il nous a fait co-siéger (« en lui » dit Saint Paul) co-siéger au Ciel. C’est une union très profonde que le Christ veut réaliser et elle se fait à travers les mystères pour peu que nous entrions dans le mystère.
Comment allons-nous nous unir au mystère ? Cela se fait principalement par la foi. La foi fait que le mystère cesse de nous être étranger. Si quelqu’un qui voit un homme dans la rue sans savoir que cet homme est son père, ce qui arrive à cet homme-là lui est étranger. Lorsqu’il sait que cet homme est son père, c’est tout autre chose. Cette connaissance que nous avons, fait que la personne cesse de nous être étrangère. Or, par la foi Jésus-Christ cesse de nous être étranger. C’est par la foi que nous le saisissons et c’est par la foi que nous saisissons les mystères. Cette foi va engendrer la charité, l’amour de Dieu, la reconnaissance envers Jésus-Christ, un grand désir d’être uni à lui, un grand désir de recevoir ses dons, mais plus encore que de recevoir ces dons, de le recevoir lui. Et ce désir débouche sur la charité, nous donne la charité, l’union à Dieu. Mais le début c’est la foi !
Lorsque Jean-Paul II écrit dans sa première encyclique Redemptor hominis que le Christ par son incarnation s’est en quelque sorte uni à tout homme, c’est une hérésie, c’est presque un blasphème ! Par l’incarnation le Christ désire s’unir à tout homme, mais tous les hommes ne s’unissent pas à lui ! Le Christ pensait à tous les hommes lorsqu’il est venu sur terre et en pensant à eux il leur a mérité les grâces, mais Notre Seigneur dit à sœur Josépha Ménendez, une religieuse de Poitiers a laquelle il est apparu au XXe siècle, il lui dit : « Ma plus grande souffrance a été de savoir que j’avais mérité tant de grâces et que tant de grâces ont été méprisées par les hommes. » Bien sûr, le Christ est venu pour tous les hommes, mais il ne suffit pas d’être un homme pour être sauvé par le Christ ! Il suffit d’être un homme pour que le Christ veuille nous sauver, mais encore faut-il répondre ! Et c’est pour cela que j’espère, mes biens chers Frères, que la méditation des mystères que nous faisons en compagnie de saint Thomas d´Aquin, en complétant également avec le catéchisme de Saint Pie x et puis Dom Marmion et d’autres, j’espère que cette méditation du mystère va vous enthousiasmer, vous faire découvrir la profondeur du mystère de Jésus et vous faire entrer dans une foi profonde. L’esprit contre-révolutionnaire de Mgr Lefebvre lui vient de la contemplation du mystère du Christ. Des théologiens contemporains qui ont su exposer des vérités comme Mgr Lefebvre nous les exposait, mais Mgr Lefebvre est le seul à les avoir mises en œuvre, parce qu’elles venaient chez lui d’une contemplation du mystère, d´une contemplation très profonde.
Le Christ est l’artisan de notre rédemption dans les mystères, c’est-à-dire que ses mystères méritent la grâce, provoquent la grâce, créent la grâce d’une certaine manière. Les mystères engendrent la grâce. Elle est communiquée à tous ceux qui veulent la recevoir par la foi.
Dans ses mystères, le Christ est notre modèle
« Je vous ai donné l’exemple, dit-il aux apôtres, afin que vous fassiez ce que vous m’avez vu faire. » Il dit cela pour le sacrement de l´eucharistie, mais d’une façon plus générale Notre Seigneur a dit plusieurs fois dans l’évangile « Celui qui veut être mon disciple qu’il vienne à ma suite et qu’il me suive. » Saint Grégoire commente « Suivre Jésus c´est mettre nos pas dans ses pas. » Par conséquent c’est imiter Jésus-Christ. « Je vous ai créé à mon image et à ma ressemblance » dit Notre Seigneur à sainte Catherine de Sienne. « Bien plus, en prenant votre nature je me suis fait semblable à vous. En conséquence je ne cesse plus de travailler à vous rendre semblable à moi autant que vous en êtes capables. Je m’efforce de renouveler en vos âmes, alors qu’elles marchent vers le ciel, tout ce qui s’est passé dans mon corps. »
Imiter Jésus Christ, c’est vraiment l’objet de la vie chrétienne. Les conditions de vie dans le monde ne sont que des conditions ! Nous ne sommes pas faits pour le monde. Je vous ai fait un sermon sur le monde. Nous ne sommes pas faits pour le monde, nous sommes faits pour imiter Jésus-Christ en vivant dans le monde. Ce n’est pas en une fois qu’on comprend cela, mais il faut constamment l´avoir présent à l’esprit. Dans vos examens de conscience le soir, posez-vous la question « ai-je ressemblé à Jésus-Christ ? » « Si le Christ avait été à ma place, comment aurait-il agi ? » La Providence vous donne de travailler, de rencontrer quelqu’un, d’être dans telle ou telle situation, de devoir gagner de l’argent que sais-je, tout cela ne sont que des situations comme être charpentier pour Jésus-Christ n’a pas été un but, ce fut simplement une situation dans laquelle il a exercé les vertus chrétiennes. Il faut constamment nous poser la question « Le Christ à ma place aurait-il agi comme j’ai agi ? » Et il faut nous poser la question en anticipant, c’est-à-dire pas seulement en faisant son examen de conscience le soir, mais en anticipant : « je vais être dans telle et telle situation, comment le Christ agirait-il dans cette situation ? Quelle foi vais-je mettre en œuvre pour imiter Jésus-Christ qui contemplait son Père ? Quel amour de Dieu vais-je mettre en œuvre, quel amour du prochain ? Quelle patience, quelle persévérance, quelle vertu vais-je mettre en œuvre ? »
Dans tous les mystères que nous méditons, que nous contemplons, nous voyons Notre Seigneur à l´œuvre pour être notre modèle. Ce qui fait que lorsque Dieu le Père voit son Fils et le contemple, il nous voit unis à lui et il nous inclut dans la même bienveillance, dans le même amour, il nous communique les mérites que Jésus-Christ a mérités durant sa vie mortelle. La prochaine fois nous continuerons notre contemplation des mystères, avec la purification de la sainte Vierge, avec la présentation de l’Enfant Jésus au temple, puis nous contemplerons les mystères de la vie de Jésus-Christ, puis le mystère de la Passion. Hé bien, rappelez-vous toujours ce que je viens de vous dire : les mystères du Christ sont nos mystères. Premièrement parce que nous étions présents dans la pensée de Jésus Christ et que Jésus-Christ les a vécus pour nous et qu’il nous connaissait déjà dès cet instant, et que on nous connaissant il nous appelait. Deuxièmement parce que Jésus-Christ a mérité pour nous et qu’il veut nous communiquer ses mérites pour peu que nous nous associions à lui dans le mystère. Troisièmement parce qu’il est notre modèle. Demandez à la sainte vierge de vous faire profondément pénétrer dans ces mystères.
Au nom du père et du fils et du Saint Esprit. Ainsi soit-il.