Sermon ~ La Genèse
14. Noé, l’arche, l’Église et le monde

Mes bien chers Frères,

L’Arche de Noé, est la figure, l’annonce de l’Église. Noé cherche à trouver grâce devant Dieu et non à plaire aux hommes. L’arche flotte sur les eaux du monde, elle ne se mêle pas à lui. Elle accueille en son sein ceux qui veulent le salut, elle laisse à leur perte ceux qui cherchent la gloire des hommes.

Leçon bien étrangère à l’esprit de notre époque et bien opposée à notre désir de plaire. Et pourtant…

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Notes pour le sermon
Saint Jean Chrysostome

Notes pour le sermon

Introduction

La corruption des hommes. Les fils de Dieu et les filles des hommes : les hommes pieux descendant de Seth se prennent d’amour pour des femmes impies.

Les géants : ne pas chercher ce que le Saint-Esprit ne nous révèle pas. À prendre au sens spirituel. Parallèle avec aujourd’hui : les fils de hommes sont puissants comme des géants, non comme Noé.

Malheur à vous, lorsque tous les hommes diront du bien de vous ! (Luc, 6, 26.)

Les hommes se moquaient de Noé, mais lui ne cherche qu’à trouver grâce devant le Seigneur.

Pourquoi ne pas chercher à plaire aux hommes ?
– parce que leur gloire n’est rien,
– parce que celui qui plaît aux hommes a déjà reçu sa récompense
– parce que plaire aux hommes, c’est flatter leurs passions et leurs vices
– cela dégénère vite à prendre les vices de ceux qu’on flatte.

Il est inévitable de déplaire au voleur quand on veut rendre son butin à la victime.
de déplaire au persécuteur quand on veut délivrer sa victime
de déplaire aux vicieux quand on veut corriger les pécheurs et louer les justes.

Ceux qui veulent plaire aux hommes reprochent aux Noé de ne pas plaire. “C’est de votre faute si le monde vous critique. Vous êtes trop durs. Etc.”

Ils poussent à mettre la vérité sous le boisseau pour ne pas déplaire.

Ils critiquent ceux qui ne cherchent qu’à plaire à Dieu et ils excusent ceux qui cherchent à s’entendre avec le monde, voire ils louent leur habileté.

Ils se donnent bonne conscience en ne cherchant à plaire qu’à quelques-uns, choisis par eux comme acceptables. Mais cela ajoute l’hypocrisie au vice.

Celui qui veut plaire s’interdit de faire le bien dans tout la mesure où il veut plaire.

S. Mt 6, 1 « Gardez-vous de pratiquer votre justice devant les hommes, pour en être vus; autrement, vous n’aurez point de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux.

2 Lors donc que tu fais l’aumône, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, afin d’être glorifiés par les hommes. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. 3 Mais quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, 4 afin que ton aumône se fasse en secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

19 Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où la teigne et la rouille détruisent, et où les voleurs percent et dérobent; 20 mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où la teigne et la rouille ne détruisent point, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent. 21 Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur.

Les trésors sont à prendre au sens spirituel et pas seulement matériel : là où est ton trésor, là sera ton cœur. Plaire au hommes est un trésor pour les hommes d’ici-bas.

Quand tous les hommes et non plus seulement quelques-uns disent du bien de nous, c’est un signe de damnation.

Ce qu’il y a de plus pénible en enfer, c’est d’avoir perdu la bienveillance de Dieu.

Béatitude des persécutés

Au contraire : « Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la justice ; parce que le royaume des cieux est à eux. Vous serez heureux lorsque les hommes vous chargeront de malédictions, qu’ils vous persécuteront, et qu’ils diront faussement toute sorte de mal contre vous à cause de moi.

Exemples

Les parents qui flattent leurs enfants ou simplement qui pensent que satisfaire les passions va donner de bonnes dispositions.

L’Église moderne veut plaire au monde. Discours de Paul VI à propos du concile : plus de condamnation, mais la bonne entente.

Tous libéraux. C’est la raison d’être de leur libéralisme.

Les voies de la réduction. Mieux vaut prier qu’agir, disent-ils. Conservons les principes, mais ne heurtons pas les individus. On élimine les esprits forts.

De Noé à l’Église

Que l’homme critiqué ne tienne pas compte de ces critiques. Au contraire, plus il dira la vérité tôt et nettement, plus il sera en paix.

Cette attitude est liée à la condition humaine. Ce sera toujours vrai.

Dans l’Église de Vatican II, mais aussi dans la tradition et même dans la Fidélité Catholique.

Notre devoir est de rendre gloire à Dieu. Le salut des âmes suivra.

L’amour envers le prochain, c’est d’abord l’amour envers Dieu et celui-ci rejaillit sur les âmes. C’est le plus puissant moyen de toucher les âmes mal disposées.

C’est ce que Dieu valide avec l’arche.

L’arche c’est l’Église qui flotte sur les eaux mouvantes du monde.

Saint Jean Chrysostome
Sermon 23e sur la Genèse

2. Voyez combien l’Écriture est précise, et comme elle ne contient pas une seule syllabe inutile t Après nous avoir exposé l’énormité des fautes dés hommes et la peine terrible réservée aux méchants, elle nous indique celui qui, dans une pareille foule, avait pu conserver la pureté de sa vertu. En effet, la vertu par elle-même est toujours admirable, mais celui qui la pratique au milieu d’hommes qui la repoussent, mé­rite encore plus d’admiration. Aussi l’Écriture sainte nous fait admirer ce juste mêlé à ceux qui allaient éprouver la colère de Dieu, et elle dit : Noé trouva grâce devant le Seigneur Dieu. Non seulement il trouva grâce, mais devant le Seigneur Dieu. Elle nous enseigne ainsi qu’il n’a pas eu d’autre but que d’être bien vu de cet œil qui ne connaît ni le sommeil ni l’as­soupissement, et qu’il ne s’est pas inquiété de la gloire humaine, de la honte et des moqueries. Il est probable que lui, qui cultivait la vertu en opposition avec tout le monde, devait être un sujet de risées et de plaisan­teries pour ceux qui faisaient le mal ; en effet, c’est encore leur habitude à l’égard de ceux qui recherchent la vertu, au lieu de les imiter. Nous voyons bien des hommes faibles qui, ne pouvant supporter ces vices et ces plaisanteries, préfèrent la gloire humaine à la gloire immortelle et seule véritable, et se laissent em­porter et attirer par la malice des autres. En effet, il faut une âme énergique et constante pour résister à ceux qui cherchent à l’entraîner, et ne rien faire dans le but de plaire aux hommes, pour tenir son regard fixé sur 1’œil vigilant d’où elle attend sa sentence en méprisant celle du monde, pour ne pas tenir compte des louanges ou des injures humaines, mais les regar­der comme des ombres ou des rêves. Car la honte mène au péché. (Eccl. sirac 4, 25.) (est enim confusio adducens peccatum et est confusio adducens gloriam et gratiam.) Bien des gens auraient cédé à ces risées, ces sarcasmes, ces plaisanteries ; mais tel n’était pas le juste. Car il résista non seule­ment à dix, à vingt, à cent hommes, mais à toute l’es­pèce humaine, à tous ces milliers de pécheurs. Il est probable qu’on se moqua de lui, qu’on le bafoua, qu’on l’insulta, qu’on l’injuria de toute manière ; peut-être même l’aurait-on mis en pièces si l’on avait pu. Telle est toujours la fureur du vice contre la vertu ; mais, loin qu’il lui porte aucun préjudice, il la fortifie par ses attaques. En effet, telle est la force de la vertu, qu’elle triomphe de ses ennemis par ses souffrances, et qu’elle est plus victo­rieuse à mesure qu’on l’attaque davantage. Cela se voit dans une foule de circons­tances. Mais pour vous donner l’occasion de le recon­naître, car, donnez l’occasion au sage et il deviendra plus sage (Prov. IX, 9), il faudrait vous citer bien des exemples de l’Ancien et du Nouveau Testament. Ainsi, dites-moi, je vous prie, Abel n’a-t-il pas été ter­rassé et tué par Caïn ? Ne vous attachez pas seulement à ce fait que Caïn a vaincu et tué le frère dont il était jaloux et qui ne lui avait rien fait : mais considérez la suite. Observez qu’à partir de ce moment la victime a obtenu la couronne de la gloire avec celle du martyre, et que tant de siècles n’ont pu effacer son souvenir : voyez aussi que le meurtrier, le vainqueur, a mené de­puis cet instant une existence plus pénible que la mort, et que depuis lors, jusqu’à présent, il est voué à l’in­famie universelle pendant que toutes les bouches chantent chaque jour sa victime. Voilà ce qui regarde la vie actuelle ; quant à celle de l’avenir, quelles pa­roles, quelle intelligence pourraient être à sa hauteur ? Je sais que vous êtes bien capables de trouver dans les Écritures beaucoup d’exemples analogues, car elles sont faites pour notre profit, pour nous engager à fuir le vice et à rechercher la vertu. Voulez-vous trouver d’autres preuves dans le Nouveau Testament ? Ecou­tez ce que saint Luc raconte des apôtres qui se réjouis­saient d’avoir été flagellés publiquement parce qu’ils avaient été dignes de supporter cet opprobre au nom du Christ. (Act. V, 41.) Cependant les coups,de fouet sont un sujet de chagrin et d’abattement plutôt que de joie, mais les recevoir pour Dieu et à cause de lui, voilà ce qui les réjouissait. Quant à ceux qui les avaient flagellés, ils étaient consternés et embarrassés au point de ne savoir que faire : après le supplice ils se consultent entre eux : Que ferons-nous à ces hommes ? (Act. IV, 16.) Eh quoi ! Vous les avez fait flageller, vous leur avez fait subir mille souffrances et vous hésitez encore ? Tant il est vrai que la vertu est forte et invincible et que, par les tortures même, elle triomphe de ceux qui les lui infligent.

3. Mais pour ne pas nous arrêter trop longtemps sur ce sujet, il faut revenir à notre juste et admirer profon­dément comment sa vertu portée au comble put mé­priser et dominer ce peuple qui riait de lui, s’en mo­quait, le plaisantait, le bafouait (je me répète, je le sais, mais je ne puis me détacher d’un tel sujet). Com­ment donc s’explique ce triomphe ? Je vais vous le dire : Noé ne cessait de contempler l’œil qui ne dort pas ; là se fixait toujours le regard de sa pensée ; tout le reste l’occupait aussi peu que s’il n’eût pas existé. On peut en être certain celui qui est possédé de l’amour divin au point de porter toujours ses désirs vers Dieu, finit par ne plus rien voir des choses vi­sibles ; il songe continuellement à celui qu’il aime, la nuit et le jour, en se couchant comme en se levant. Ne vous étonnez donc pas que le juste, tenant sa pensée uniquement dirigée vers Dieu, ne se soit pas inquiété de ceux qui voulaient le faire succomber. Déployant tout son zèle et soutenu par la grâce d’en-haut, il leur était supérieur à tous. Noé trouva grâce devant le Sei­gneur Dieu. Devant la race des hommes du temps il ne trouvait ni grâce ni affection, car il ne suivait pas la même route, mais il trouva grâce devant celui qui sonde les cceurs et qui approuva ses pensées. Quel mal, dites-moi, pouvaient lui faire lès railleries et les sarcasmes de ces contemporains, puisque Celui qui forme nos cœurs et connaît toutes nos actions le féli­citait et le couronnait ? De quoi servent à un homme les éloges et l’admiration de toute la terre, si le Créa­teur de toutes choses, le Juge infaillible, le condamne dans le jour terrible ? Réfléchissons-y bien, mes bien-aimés, comptons pour rien les louanges des hommes et ne les recherchons en aucune manière, mais fuyons le vice et pratiquons la vertu uniquement pour Celui qui sonde les cœurs et les reins.

C’est pour cela que le Christ, en nous enseignant à ne pas être avides des louanges humaines, finit par dire : Malheur à vous, lorsque tous les hommes diront du bien de vous ! (Luc, 6, 26.) Observez que ce mot : Malheur indique ce que sera la peine réservée. Cette exclamation présagé une calamité ; c’est presque en déplorant déjà leur sort qu’il leur dit : Malheur à vous, lorsque tous les hommes diront du bien de vous ! Et voyez la précision de ces paroles. Il ne dit pas seule­ment : les hommes ; mais : tous les hommes. Il est im­possible, en effet, que l’homme de bien qui suit la route étroite et pénible, et obéit à tous les ordres du Christ, soit loué et admiré par tous les hommes. Car le vice est bien puissant et bien hostile à la vertu. Le Seigneur sait que celui qui ne s’écarte pas de la vertu et ne demande d’autre approbation que celle d’en-haut, ne peut être loué et approuvé par tous les hommes, et voilà pourquoi il plaint ceux qui négligent la vertu pour la gloire des hommes ; car s’ils se réu­nissent tous pour vous louer, c’est la meilleure preuve que vous n’estimez pas assez la vertu. Comment, en effet, l’homme de bien pourrait-il plaire à tout le monde s’il veut délivrer les opprimés de leurs oppres­seurs, les victimes des bourreaux ? De même, s’il veut corriger les pécheurs et louer les justes, n’est-il pas probable qu’il sera approuvé d’un côté et blâmé de l’autre ? Aussi le Christ dit-il : Malheur à vous lors­que tous les hommes diront du bien de vous ! Com­ment donc ne serions-nous pas frappés d’admiration pour ce juste ? ce que le Christ nous a annoncé en pa­raissant parmi nous, lui, sans autre instruction que la loi naturelle, il l’a accompli d’une manière parfaite, et méprisant l’opinion des hommes, il n’a recherché la vertu sur terre que pour obtenir la grâce de Dieu, car Noé trouva grâce devant le Seigneur Dieu. Du reste, c’est à cause des vertus dont il était doué qu’il a trouvé grâce devant le Seigneur Dieu, comme l’explique l’admirable prophète inspiré par le Saint-Esprit ; il faut étudier la suite pour voir ce que Dieu pense de lui. Voici les générations de Noé : Noé fut un homme juste, accompli dans son temps ; Noé plut à Dieu. Voilà une manière étrange de commencer une généa­logie. L’Écriture sainte commence par dire : voici les générations de Noé ; elle excite notre attention comme si elle allait raconter sa généalogie, dire quel était son père, d’où venait sa famille, comment lui-même était venu au monde, et enfin tout ce que l’on.trouve d’ordinaire dans les généalogies ; mais elle laisse tout cela de côté, et, se mettant au-dessus des usages reçus, elle dit : Noé était un homme juste, accompli dans son temps ; Noé plut à Dieu. Voyez quelle admirable généalogie ! Noé était un homme. Remarquez que le nom qui nous est commun à tous est employé ici pour glorifier le juste. Car, tandis que les autres, plongés dans les voluptés charnelles, avaient perdu la qualité d’hommes, Noé seul, au mi­lieu d’un si grand peuple, garde la vraie condition de l’homme. Ainsi il est homme parce qu’il cultive la vertu. En effet, avoir l’apparence d’un homme, les yeux, le nez, la bouche, les joues et tout le reste, ce n’est pas là ce qui fait l’homme, car tout cela appar­tient au corps. Nous appelons homme celui qui con­serve intact le type de l’homme. Mais comment le dé­finir ? On dit que c’est un être raisonnable. Quoi donc ! les méchants n’avaient-ils pas aussi la raison ? Si, mais cela ne suffit pas : il faut aussi chercher le bien et fuir le mal, dominer les mauvaises passions et obéir aux ordres du Seigneur : voilà l’homme !