Sermon ~ L’Église à travers l’Apocalypse
211. Le cheval blanc et ses adversaires

Mes bien chers Frères,

Il faut froid, dehors, ce sont les ténèbres. Alors, resserrons-nous autour du bon Jésus dans l’étable.

L’Apocalypse nous le montre comme un cavalier sur un cheval blanc qui conquiert le monde. Le cheval blanc, c’est l’Église, c’est-à-dire nous tous. Oui, bien que tout petit enfant dans la crèche, il commence déjà la conquête des âmes.

Télécharger

Texte sacré de l’Apocalypse
Résumé du sermon

Texte sacré de l’Apocalypse

Chapitre VI. Et je vis que l’agneau avait ouvert un des sept sceaux, et j’entendis l’un des quatre animaux qui disait, d’une voix semblable au tonnerre : Viens, et vois. — 2, Et je vis : et voici un cheval blanc, et celui qui le montait tenait un arc, et il lui fut donné une couronne, et il sortit vainqueur, afin de vaincre. Et lorsqu’il eut ouvert le deuxième sceau, j’entendis le second animal qui disait : Viens, et vois. Et il sortit un autre cheval, roux : et, à celui qui le montait, fut donné (le pouvoir) de retirer la paix de la terre, et de (pousser les hommes) à s’entretuer les uns les autres, et il lui fut donné un glaive de grande taille. — Et lorsqu’il eut ouvert le troisième sceau, j’entendis le troisième animal qui disait : Viens, et vois. Et voici un cheval noir : et celui qui le montait tenait une balance à la main. — 6, Et j’entendis comme une voix au milieu des quatre animaux qui disait : Une double livre de froment pour un denier, et trois doubles livres d’orge pour un denier, et ne touche ni au vin ni à l’huile. Et lorsqu’il eut ouvert le quatrième sceau, j’entendis la voix du quatrième animal qui disait : Viens, et vois. Et voici un cheval blême : et celui qui le montait avait nom la mort, et l’enfer le suivait, et il lui fut donné puissance sur les quatre parties de la terre (pour) tuer par le glaive, par la famine, par la mort, et par les bêtes de la terre. Et lorsqu’il eut ouvert le cinquième sceau, je vis sous l’autel les âmes de ceux qui avaient été mis à mort à cause du Verbe de Dieu, et du témoignage qu’elles rendaient ; et elles criaient d’une voix puissante, disant : Jusqu’à quand, Seigneur, saint et véridique, ne jugerez-vous point et ne vengerez-vous point notre sang, de ceux qui habitent la terre ? Et il leur fut donné à chacun une robe blanche ; et il leur fut dit de demeurer en paix encore un peu de temps, jusqu’à ce que soit complété (le nombre de) ceux qui servent Dieu avec eux, et de leurs frères qui doivent être mis à mort comme eux. Et je vis, lorsqu’il eut ouvert le sixième sceau : et voici qu’il se fit un grand tremblement de terre, et le soleil devint noir comme un sac de crin ; et la lune tout entière devint comme du sang ; et les étoiles tombèrent du ciel sur la terre, comme un figuier laisse tomber ses premières figues quand il est secoué par le vent. Et le ciel disparut comme un livre enroulé, et toute montagne, et toutes les îles furent ébranlées de leurs places. Et les rois de la terre, et les princes, et les tribuns, et les riches et les puissants, et tous les esclaves, et les hommes libres, se cachèrent dans les cavernes, et dans les rochers des montagnes. Et ils disent aux montagnes et aux rochers : Tombez sur nous, et cachez-nous du visage de celui qui est assis sur le trône, et de la colère de l’Agneau. Car voici venir le grand jour de leur colère : et qui pourra demeurer ferme ?

Résumé du sermon

L’un après l’autre, les sept sceaux seront brisés, et chacun d’eux laissera entrevoir l’état de l’Église aux points les plus importants de son développement.

Le cheval blanc, l’Église à la conquête du monde

Celui qui le monte : le Christ, tient à la main l’arc de l’Écriture Sainte. Couronne de roi.

Il sort à la conquête du monde.

Job déjà avait vu, dans le cheval, l’image du prédicateur de l’Évangile, quand il disait : Le souffle fier de ses naseaux répand la terreur, Il frappe du pied la terre, il s’élance avec audace, il court avec ardeur au-devant des hommes armés. Il méprise la peur et ne s’effraie point des glaives. Les flèches sifflent autour de lui, les haches et les boucliers résonnent sans l’intimider. Il écume, il frémit et semble vouloir dévorer la terre ; il est intrépide au bruit de la trompette. Dès qu’il entend sonner la charge, il dit : Allons. Il sent de loin la guerre, il comprend les encouragements des chefs et les cris des soldats. (Job 39, 20-26)

Le cheval roux, les persécutions sanglantes

Roux, de la couleur du sang. Et celui qui le montait, c’est-à-dire le diable, dont les persécuteurs ne sont que les agents, reçut le pouvoir de faire disparaître la paix de la terre. Dieu, en effet, permit au démon de susciter de violentes tempêtes contre l’Église, comme il lui avait permis jadis d’exercer ses fureurs contre Job, non pour l’anéantir, mais pour faire éclater sa vertu. Il lui donna un glaive de grande taille, quand il le laissa utiliser la puissance romaine à son profit, pour frapper l’Église dans sa chair vive et chercher à la retrancher du monde.

Dès qu’une persécution est déchaînée, les hommes donnent libre carrière à leurs plus mauvais instincts : ils se dénoncent, se pourchas­sent, se tuent entre eux avec la dernière cruauté. Et cette lutte fratricide pénètre jusqu’au sein des familles, ainsi que l’avait annoncé Notre-Seigneur : Vous serez livrés à la mort par vos parents, par vos frères, par vos proches, par vos amis. C’est pourquoi saint Jean vit ici que les hommes se livraient à la mort les uns les autres.

Le cheval noir, les hérésies

Quand le sang eut coulé à flots, le démon, constatant qu’il ne lui servait à rien de faire des martyrs ; que, tout au contraire, l’Église sortait chaque fois plus forte et plus vivace des persécutions dont il l’affligeait, se résolut à changer de tactique, et chercha à détourner les hommes de la vraie foi en fomentant des hérésies. Cette nouvelle forme de guerre est annoncée par le cheval noir dont le cavalier tenait une balance dans la main. Ce cheval est noir parce que, de toutes les couleurs, celle-là est la plus réfractaire à la lumière : or, les hérétiques sont, de tous les pécheurs, les plus incapables de refléter la lumière de la vérité, c’est-à-dire le Christ lui-même. Le prophète Jérémie avait écrit dans le même sens : Leur visage est plus noir que des charbons.

Sainte Thérèse a bien noté ce point, dans le récit qu’elle fait de la vision où son âme lui fut montrée sous la forme d’un miroir, dans lequel apparaissait Jésus-Christ :

À l’aide de la lumière qui me fut donnée, écrit-elle, je vis comment, dès que l’âme commet un péché mortel, ce miroir se couvre d’un grand nuage, et demeure extrêmement noir, en sorte que Notre-Seigneur ne peut s’y représenter ou y être vu, quoiqu’il soit toujours présent, en tant que donnant l’être. Quant aux hérétiques, c’est comme si le miroir était brisé ; malheur incomparablement plus affreux que s’il n’était qu’obscurci.

Et le cavalier qui le montait avait une balance dans sa main : entendez par là qu’il pesait les objets dans sa main, et que celle-ci lui servait comme de balance. C’est là l’image de ce que font les hérétiques lorsqu’ils prétendent juger de toutes choses, et spécialement du sens des Écritures, selon leur propre façon de voir, sans égard pour les règles que l’Église a fixées. Luther tenait une balance dans sa main quand, méprisant un enseignement quinze fois séculaire, il inventait la théorie du libre examen ; et Calvin l’imitait quand il osait établir la société chrétienne sur de nouvelles bases, ou quand il expliquait la présence du Christ dans la sainte Hostie d’une façon jusqu’alors inédite. Les Docteurs véritables, au contraire, et les maîtres authentiques de la foi catholique, enchaînant, avec saint Paul, leur intelligence à la suite du Christ, pèsent toutes choses dans la balance de la tradition, se gardant bien de faire la moindre pression pour en modifier les données. Ils s’attachent fidèlement aux explications développées par les saints Pères et, les exposant à nouveau en des formes plus appropriées aux besoins de leur temps, ils les maintiennent cependant dans le même cadre, selon le conseil de l’auteur sacré : Ne franchis point les bornes vénérables que tes pères ont posées.

Les consolations dans les épreuves

Devant cette dévastation, l’Église éprouve le besoin de rassurer ses fidèles, qui s’alarment et redoutent de voir la foi submergée bientôt sous la marée montante de l’hypercritique et du rationalisme. Du milieu des quatre animaux, c’est-à-dire solidement appuyée sur la doctrine de l’Évangile, elle fait entendre sa voix : « Nayez pas peur, dit-elle, petit troupeau : la vérité n’a rien à craindre des progrès de l’erreur. Si vous savez rester simples comme des enfants ; si vous apportez à Dieu le denier d’une foi pure, confiante, sans réserve, vous obtiendrez toujours, en échange, une double livre de froment, ou trois doubles livres d’orge, c’est-à-dire la double intelligence de l’Écriture, pesée à son vrai poids, dans son sens littéral et dans son sens mystique. » Le froment représente le Nouveau Testament, qui est pour l’âme la nourriture parfaite, comme le blé l’est pour le corps. L’orge, aliment plus rude, symbolise l’Ancien Testament, et il en faut trois mesures : parce qu’au lieu d’avoir l’unité du Nouveau, il se décompose en trois parties bien distinctes : la Loi, les livres historiques et les Prophètes.

Aujourd’hui, comme il y a vingt siècles, Dieu continue de révéler aux petits et aux humbles ce qu’il cache aux savants et aux doctes de ce monde. La vérité peut être obscurcie par les fils des hommes, elle ne sera point entamée. Dieu veille sur elle, il ne laissera pas altérer dans son Église le sens authentique de Sa parole. C’est pourquoi 1a voix prophétique continue : Ne touchez ni au vin ni à l’huile, marquant par là qu’il est interdit au démon et à ceux qui travaillent pour lui, d’enlever à l’Écriture quoi que ce soit de sa force ou de sa douceur.