Méditation
du Chemin de la Croix
par l’abbé Routhier
AU PIED DE L’AUTEL
Ô Jésus, mon Sauveur, je viens me ranger à votre suite, et vous accompagner dans le chemin qui vous conduit au supplice.
Ce n’est plus par des paroles, mais par des actes, que vous allez maintenant m’enseigner la science de vivre.
C’est quand vous souffrez que j’ose m’approcher de vous parce que la souffrance vous rend plus semblable à nous. Mais, quelque défiguré que vous m’apparaissiez dans la Voie Douloureuse, je vous reconnais encore pour mon Dieu, afin que vous reconnaissiez aussi mon âme sous les haillons et les plaies qui la couvrent. Faites que ma vie ressemble à la vôtre, et quand j’arriverai à mon Calvaire à votre suite, faites que mon âme, en s’échappant de mon corps crucifié, vous suive également au delà du tombeau.
PREMIÈRE STATION
Jésus est condamné à mort.
Pourquoi Jésus est-il condamné à mort ? A-t-il commis quelque crime ? Non. Personnellement il est l’innocence même. Et cependant il faut qu’il meure pour les péchés des hommes dont il s’est fait le frère. En entrant dans la famille humaine, il est devenu solidaire de nos fautes, et il doit subir la sentence de mort portée contre le péché.
En entrant dans la vie, nous aussi sommes condamnés à mort.
Pourquoi ? Pour nos fautes personnelles ? — Non, puisque nous n’avons pas encore péché ; mais pour la faute de nos premiers parents.
Terrible et mystérieuse solidarité ! Par le seul fait que nous naissons hommes, nous recevons au même instant et le bienfait de la vie et notre condamnation à mort !
La sentence est irréformable, et sans commutation de peine possible — morte morieris ! Seule la date de l’exécution est incertaine.
Ah ! quel mal épouvantable est-ce donc que le péché puisqu’il a attiré un pareil châtiment sur l’humanité, et puisqu’il a fallu le dernier supplice d’un Dieu pour l’expier !
Ô mon Jésus, qui avez voulu mourir pour moi, vous ne me demandez pas de mourir mais de vivre pour vous en ce monde afin de vivre avec vous dans l’autre. Car je ne mourrai pas tout entier, non omnis moriar.
DEUXIÈME STATION
Jésus est chargé de sa Croix.
Voilà l’arbre de vie qui va réparer tous les maux causés par l’arbre de mort du paradis terrestre.
C’est instrument du supplice de Jésus, mais c’est aussi l’instrument de notre salut. C’est par la croix qu’un Dieu va mourir, mais c’est aussi par elle qu’il va triompher de l’enfer et racheter l’humanité.
C’est l’étendard qui va remplacer les aigles romaines, et reconquérir l’univers pour les siècles des siècles !
Dès notre entrée dans la vie, chacun de nous est aussi chargé de sa croix. À peine nés, nous sommes en proie aux maladies et aux souffrances physiques ; puis viennent le travail, la lutte pour la vie, les peines d’esprit et les douleurs morales.
Mais la croix principale qui blesse nos épaules et nous fait succomber sous son poids, c’est notre nature portée au mal.
Voilà l’instrument du supplice qui doit devenir pour nous l’instrument du salut.
On raconte que la croix de Jésus fut taillée dans un arbre, qui avait poussé au bord du torrent de Cédron, et qui, ayant été renversé, servait de pont pour franchir le torrent, et relier la Vallée de Josaphat à Jérusalem. Touchant symbole !
La croix est aussi pour chacun de nous le pont mystérique qui relie cette vallée de larmes à la Jérusalem céleste !
Ô mon Jésus, puisque telle est la vertu et la puissance de la croix, je l’accepte de vos mains, et je veux la porter courageusement tous les jours de ma vie.
TROISIÈME STATION
Jésus tombe pour la première fois.
Jésus n’a fait encore que quelques pas dans la Voie douloureuse, et déjà les forces lui manquent. Le poids de la croix l’accable, et il tombe.
Hélas ! Tel est le sort de chacun de nous à ses premiers pas dans le chemin de la vie. Rappelons nos souvenirs, remontons jusqu’à notre enfance, et nous serons forcés d’avouer que nous avons péché dès que nous sommes devenus responsables de nos actes.
La première étape de notre voyage en ce monde a été marquée par une chute.
Mais entre nos chutes et celles de Jésus il y a une différence essentielle. Les nôtres sont morales, celles de Jésus sont physiques. C’est la force corporelle qui manque au Sauveur, c’est le courage moral qui nous fait défaut.
Le poids de la croix était hors de proportion avec la vigueur physique de notre doux Jésus, et c’est pourquoi il succombe, malgré son courage et son énergie. Mais nous, pourquoi tombons-nous ? La croix qu’il plait à Dieu de mettre sur nos épaules est-elle au-dessus de nos forces ? Jamais ! Dieu est juste et il proportionne les grâces aux épreuves. C’est le bon vouloir et le courage qui nous font défaut. Quand nous tombons c’est que nous le voulons bien ; c’est que la chute a pour nous des charmes ; c’est que la terre nous attire avec ses fleurs et ses fanges.
Ô mon Jésus, je veux être à l’avenir plus généreux et plus fort ; plus généreux dans mes épreuves, plus fort contre mes passions mauvaises.
QUATRIÈME STATION
Jésus rencontre sa très-sainte mère.
Dans l’abattement qui suit la chute, il faut quelque chose qui réconforte. Sans doute, il était triste pour Jésus de rencontrer sa mère dans les douloureuses circonstances où il se trouvait. Et cependant, au milieu de tous ces ennemis acharnés, qui l’accompagnaient en vociférant, ce dût être un soulagement d’apercevoir tout-à-coup l’angélique figure de sa mère bien-aimée. Il s’en allait mourir, et cette dernière rencontre sur terre avec celle qui lui avait donné la vie fut sans doute sa dernière lueur de bonheur en ce monde. Mais en même temps il a dû puiser dans la vue de cette mère intrépide, qu’aucun obstacle n’arrêtait, un nouveau courage pour accomplir son sacrifice.
Rappelez-vous les souvenirs de votre première chute, et vous y retrouverez quelque scène analogue.
Dans les jours de stupeur, de tristesse et de remords qui ont suivi, vous avez aussi rencontré votre mère ; ou, si elle était loin de vous, dans un monde meilleur, peut-être, vous vous êtes souvenu d’elle et de ses enseignements.
Sa vue ou son souvenir ont suffi pour vous faire regretter votre chute.
Mais, hélas ! peut-être êtes-vous de ceux qui n’ont pas eu de mère digne de ce nom, et qui n’ont pas reçu les salutaires leçons de l’amour maternel.
Alors il y a une autre mère qui s’est certainement trouvée sur votre chemin, et dont la rencontre a dû vous faire rentrer en vous-même : c’est l’Église.
Elle vous a appelés pour vous consoler et vous donner de nouvelles forces — L’avez-vous écoutée ?
Ô Marie, quand vous me voyez faiblir sous le poids de ma croix, venez à ma rencontre. Un regard de vous m’encouragera à la porter généreusement jusqu’à mon calvaire.
CINQUIÈME STATION
Simon le Cyrénéen aide Jésus à porter sa croix.
Un homme aidant un Dieu à porter sa croix ! Quel sujet de méditation !
Cette aide était bien due, certes, puisque c’était pour les péchés de l’humanité que Jésus souffrait.
Et cependant il semble que le secours donné par l’homme à Dieu ne fut que prêté, et que Jésus ait contracté l’engagement de le rendre. Car aujourd’hui c’est nous qui portons notre croix et c’est Jésus qui nous aide.
« Venez à moi, vous tous qui êtes chargés, et je vous soulagerai, » nous dit-il.
Et les prêtres qui sont d’autres Christs sont toujours à nos côtés, prêts à nous assister, et à soulever nos croix quand elles nous écrasent.
Mais pour mériter que Dieu nous aide, il faut que nous aidions nos frères.
Dans ce grand pèlerinage de la vie où nous cheminons tous si péniblement, chargés de nos croix, c’est un devoir social de nous aider mutuellement. Il faut que les forts assistent les faibles, et que les moins chargés viennent au secours de ceux dont les croix sont plus lourdes.
Ô mon Jésus ! Ai-je bien compris ce grand devoir de la charité ? Au lieu d’allégir les croix des autres ne les ai-je pas rendues plus lourdes par mes dénigrements, mes injustices, mes envieuses et basses jalousies ? Au lieu d’aplanir le chemin qu’ils suivent, n’y ai-je pas plutôt semé des obstacles pour les faire tomber ? Ne me suis-je pas réjoui de leurs misères et de leurs chutes ?
Ô Jésus, donnez-moi pour mon prochain la charité du Cyrénéen, et faites moi bien comprendre que qui donne aux pauvres et aux faibles prête à Dieu.
SIXIÈME STATION
Sainte Véronique essuie la face de Jésus.
Que représentent cette femme et sa louable action ? Quand nos crimes ont défiguré notre âme, quand ployant sous le poids de notre croix, meurtris, brisés et souillés, nous ne pouvons plus être regardés comme des images de Dieu, trouvons-nous en ce monde une Véronique qui vienne essuyer notre visage, en effacer les souillures, et nous rendre notre ressemblance avec le Créateur ?
Oui, l’Église remplit ce rôle. Comme Véronique, qui s’ouvrit un chemin à travers les soldats et les bourreaux, elle s’avance au milieu des démons qui entourent notre âme pécheresse, et elle leur dit : arrêtez, cet homme est un enfant de Dieu ; laissez-moi essuyer sa face et lui rendre sa primitive beauté.
Et par ses prières, et par ses signes mystérieux qu’elle nomme Sacrements, l’Église rétablit en nous les divins caractères ; elle fait reparaître au front du chrétien les traits célestes qu’il avait après son baptême, et, s’il meurt en cet état, les anges le reconnaissent au seuil du paradis et s’écrient : Voilà bien l’image de notre Dieu ! Voilà son portrait fidèle. Deus, ecce Deus !
SEPTIÈME STATION
Jésus tombe pour la deuxième fois.
Pourquoi ces chutes réitérées de Jésus dans la Voie douloureuse ?
Sans doute, notre divin Sauveur a voulu nous apprendre que même après plusieurs chutes nous ne devons pas nous décourager et perdre espérance.
Mais pourquoi ce chiffre mystérieux de trois chutes ? Il doit y avoir une raison qui explique ce nombre ; car Dieu ne fait rien au hasard.
Serait-ce parce que nos chutes dans le chemin de la vie sont de trois espèces, puisque nous péchons envers Dieu, envers le prochain et envers nous-mêmes ?
Serait-ce parce que nous sommes soumis dans ce monde à trois genres d’épreuves qui nous accablent tour à tour, 1o dans nos corps, par les maladies, les infirmités et les fatigues ; 2o dans nos âmes, par les peines d’esprit et les angoisses du cœur ; 3o dans nos biens, par les revers de fortune, la pauvreté et la misère ?
Ces explications sont peut-être plausibles ; mais je croirais plutôt que Jésus a voulu par ses trois chutes expier les péchés que nous commettons contre chacune des personnes de la Sainte Trinité.
Ô mon Jésus, je confesse à vos pieds que je ne saurais calculer le nombre de mes chutes, tant elles ont été multipliées ! N’en tenez pas vous-même un compte trop rigoureux, et faites en sorte qu’elles ne m’enlèvent pas les forces nécessaires pour continuer de marcher à votre suite.
HUITIÈME STATION
Jésus rencontre les filles de Jérusalem.
À la vue de ces femmes qui pleuraient sur son sort, Jésus fut sans doute bien touché, et il dût leur en être reconnaissant. Mais il vit en même temps qu’elles s’affligeaient de ses souffrances, sans songer aux péchés des hommes qui en étaient la cause.
Leur douleur était toute naturelle, un effet purement nerveux, peut-être, et elles étaient loin de penser que c’était pour leurs propres fautes et pour les crimes de leur nation et du monde entier que Jésus allait mourir.
Le divin condamné veut les éclairer, et leur adresse cette leçon, que nous avons nous-mêmes méritée tant de fois :
« Pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants ! »
Cette scène pleine d’enseignements est une des plus fréquentes dans la vie.
Nos âmes sont des filles de la Jérusalem céleste ; et quels sont les maux qui les attendrissent et les font pleurer ? Ce sont les maux purement temporels et elles restent insensibles aux maux spirituels. Les spectacles de la souffrance, de la misère, de la maladie, de la mort, les émeuvent jusqu’aux larmes ; et elles regardent d’un œil sec les révoltes contre Dieu, les crimes, les immoralités, les scandales. Que dis-je ? Les scandales les amusent, et elles ne s’affligent pas même sur leurs propres misères morales et sur leurs fautes sans nombre !
Ô Jésus, faites-moi comprendre de plus en plus que, parmi tous les maux qui affligent l’humanité, le plus digne de nos larmes est le nombre et l’énormité des péchés que nous commettons contre vous.
NEUVIÈME STATION
Jésus tombe pour la troisième fois.
Scrutons encore ce mystère douloureux des trois chutes de Jésus.
La troisième est plus profonde que les deux autres. Jésus est littéralement écrasé sous le poids de sa croix. Il est étendu, le front dans la poussière, et les bourreaux craignent qu’il ne puisse plus se relever ; car la vie semble éteinte en lui.
Ce triste état de Jésus est celui de l’homme qui a péché contre la troisième personne de la Sainte Trinité. Sa condition est désespérée parce que son crime est presque irrémissible. Tant que le chrétien n’a péché que contre Dieu le Père, ou Dieu le Fils, il peut encore se repentir parce qu’il lui reste la volonté de se sauver. Mais quand il a péché contre le Saint-Esprit, c’est sa volonté qui est pervertie ; c’est son intelligence qui s’est rendue coupable, en repoussant et reniant la vérité qu’elle reconnaît, en fermant les oreilles pour ne pas entendre Dieu qui lui parle, et en n’ouvrant la bouche que pour l’outrager et le blasphémer !
C’est le crime presque irréparable, la déchéance finale. Le pécheur ressemble alors à un cadavre, car toute vie surnaturelle est éteinte en lui.
Ô Jésus, ne permettez pas que je tombe jamais dans ce lamentable état. Mais s’il m’arrivait d’y tomber, ne m’abandonnez pas, vous qui vous êtes relevé de votre troisième chute, et donnez-moi encore une fois la force et la volonté de me sauver.
DIXIÈME STATION
Jésus est dépouillé de ses vêtements.
Jésus est arrivé au bout de la Voie douloureuse, au sommet de la montagne où il doit mourir, et c’est alors qu’il est dépouillé de ses vêtements.
Ce dépouillement symbolise le détachement de toutes choses qu’il faut subir bon gré mal gré à la fin de la vie. Quand l’homme achève de parcourir son pénible chemin, et a gravi la montagne de la vieillesse, tous les biens de ce monde lui sont ravis les uns après les autres. Les forces l’abandonnent, la santé lui fait défaut, les espérances, les amours, les illusions se flétrissent et tombent comme des vêtements en lambeaux. Il a encore des richesses, peut-être, mais il n’en peut plus jouir ; des honneurs, mais il n’y tient plus.
Tous les vains dehors du faste et des plaisirs n’ont plus de charme pour lui, et il les sacrifierait pour une seule année de jeunesse. Mais la jeunesse ne reviendra plus ; et les vains ornements de sa vie, tombant les uns après les autres, le laissent bientôt dans cet état de nudité qu’il avait à son entrée dans le monde.
Une seule chose lui reste encore. C’est la croix, et il n’en sera séparé que par la mort.
Ô mon Jésus, faites-moi la grâce de l’aimer cette croix, puisqu’elle doit être ma compagne pendant toute ma vie. Car pour le chrétien qui l’aime elle devient un appui, un bâton de vieillesse, une échelle merveilleuse qui lui sert à monter vers vous.
ONZIÈME STATION
Jésus est attaché à la Croix
Voilà bien le dernier acte du drame de la vie.
Jusque là l’homme a seulement porté la croix ; mais rien ne l’y attachait, et il pouvait encore la rejeter loin de lui. Dorénavant il y sera attaché, cloué. Il ne formera plus avec elle qu’un seul être, et la mort seule pourra les séparer.
Mais si cette immolation du chrétien sur la croix est volontaire et résignée, quelle transformation elle opère en lui !
Jusque là la croix pesait sur lui et l’écrasait. Maintenant c’est lui-même qui s’étend sur elle, qui la domine comme un vainqueur, qui en prend possession comme un roi fait de son trône. Elle est encore l’instrument du supplice, mais elle rayonne déjà comme un instrument de glorification.
Pour reconnaître et honorer les plus méritants de leurs sujets, les souverains de ce monde attachent sur leurs poitrines des croix d’honneur. Ainsi la croix de Jésus devient la décoration du chrétien, et le signe qui le fera reconnaître par le roi du ciel.
Ô mon Jésus, je veux m’attacher volontairement à la croix, puisque vous avez transformé ce signe d’ignominie en signe de gloire, et puisque c’est la marque à laquelle vous reconnaîtrez vos élus.
DOUZIÈME STATION
Jésus est élevé en croix et meurt.
Voilà le commencement de l’apothéose. La croix se fait piédestal, et le supplicié est élevé au-dessus des autres hommes. Il domine la terre dont il est dorénavant détaché. La Jérusalem terrestre est sous ses pieds, et les rayons qui descendent du ciel, en perçant les ténèbres qui l’enveloppent, lui révèlent que les portes de la Jérusalem céleste sont ouvertes pour le recevoir.
Il meurt ; et dès lors le Dieu, qui s’était éclipsé, reparaît et manifeste sa puissance. La terre tremble, les tombeaux s’ouvrent et les morts ressuscitent.
Ô Jésus ! j’allais déjà m’habituer à ne voir en vous que l’homme ! Pardon, je reconnais en vous mon Dieu, et je vous adore ! J’adore aussi votre croix sainte, et je reconnais qu’elle est l’arbre de la vie. Greffez-moi sur ce bois sacré comme un rameau vivace afin que j’y puise la sève divine que votre sang y fait circuler !
TREIZIÈME STATION
Jésus est descendu de la croix et remis à sa mère.
La mission de la croix est finie, et Jésus peut maintenant en être détaché. Elle devait être pour lui une source de mérites infinis et racheter l’humanité. C’est fait ; consummatum est, tout est consommé. C’est pourquoi le corps est détaché de la croix, devenue inutile ; et il est remis à sa mère qui reconnaît à peine le fruit de ses entrailles tant il est défiguré.
Le même sort nous attend. Un jour, qui est peut être bien proche, après notre crucifixion dans les terreurs et les angoisses de l’agonie, notre âme s’envolera vers la patrie ; et notre corps descendu de la croix — c’est-à-dire délivré enfin de toute douleur, — sera remis à notre mère, la sainte Église.
Elle nous recevra sur ses genoux, comme elle nous a reçus au jour du baptême, et, gémissant tristement, elle dira à son époux Jésus : « Voyez comme nos enfants sont fatigués, et comme leurs yeux sont fermés à la lumière de ce monde ; donnez-leur le repos et la lumière de l’éternité, requiem æternam dona eis Domine, et lux perpetua luceat eis !
QUATORZIÈME STATION
Jésus est mis dans le sépulcre.
Tout défiguré qu’il est, le corps de Jésus est encore un objet d’amour et de vénération pour sa mère. Elle l’embaume, elle l’enveloppe dans un linceul parfumé, et elle le dépose dans un sépulcre neuf, où il attendra sa résurrection.
Ainsi fera l’Église de nos corps. Envahis déjà par la corruption du tombeau, ils seront devenus pour tous un objet d’horreur ; mais notre mère l’Église leur témoignera du respect et de la vénération. Elle n’oubliera pas qu’ils ont été les compagnons de nos âmes, et qu’ils sont destinés à revivre. Elle jettera sur eux ses longs voiles de deuil ; elle les parfumera de son encens, et enfin elle les confiera à la mère primitive du genre humain, la terre, d’où l’homme a été tiré.
Mais, se ressouvenant aussitôt de l’âme, elle chantera son entrée triomphale dans l’immortalité : In paradisum deducant te Angeli……………….. Au paradis que les Anges te conduisent !
Ô mon Jésus, quand l’Église catholique, dans le sein de laquelle je veux vivre et mourir, entonnera sur ma dépouille mortelle cet admirable chant d’adieu, daignez écouter sa prière et ses vœux, et commandez vous-même à vos Anges de m’ouvrir les portes de la bienheureuse éternité.
Car je crois en vous, et vous l’avez promis : celui qui croit en vous ne mourra pas pour toujours, qui credit in me non morietur in æternum.
AU PIED DE L’AUTEL
Acte de Foi
Mon Dieu, je crois fermement tout ce que la Sainte Église catholique croit et enseigne, par ce que c’est vous qui l’avez dit, et que vous êtes la vérité même.
Acte d’Espérance
Mon Dieu, appuyé sur vos promesses et sur les mérites de Jésus-Christ, mon Sauveur, j’espère avec une ferme confiance que vous me ferez la grâce d’observer vos commandements en ce monde, et d’obtenir par ce moyen la vie éternelle.
Acte d’Amour et de Charité
Mon Dieu, qui êtes digne de tout amour, à cause de vos perfections infinies, je vous aime de tout mon cœur, et j’aime mon prochain comme moi-même pour l’amour de vous.
Ainsi soit-il.
Indulgence de sept ans et sept quarantaines chaque fois que l’on récite ces trois actes.