Note sur le livre de Tobie
Vous ne trouverez le livre de Tobie que dans les bibles catholiques, car les protestants ne le comptent pas parmi les livres de la Bible, tandis que Dieu nous a révélé, et l’Église nous l’affirme par la voix du concile de Trente, voix infaillible donc, que ce livre est bien inspiré et fait partie de la révélation divine. Mais comme les protestants rejettent l’enseignement de la Tradition révélée, il leur est facile de conserver ce qui leur convient et de rejeter le reste. Les modernistes font tout pour affirmer que ce livre n’est pas historique et qu’il est trop beau pour être vrai. Voilà pourquoi je vous donne le texte intégral de ce livre.
Ce livre forme un tout parfaitement coordonné et disposé avec un art admirable. Il est partagé en six sections formant autant de tableaux : Vertus et épreuves de Tobie ; vertus et épreuves de Sara ; voyage du jeune Tobie en Médie ; son mariage avec Sara ; son retour à Ninive et la guérison de son père ; conclusion : manifestation de l’ange Raphaël, dernières années de Tobie. Certains textes écrivent Tobit au lieu de Tobie.
L’histoire de Tobie nous offre un parfait modèle de la vie domestique et renferme les exemples les plus instructifs et les plus touchants de toutes sortes de vertus, surtout celles de la vie de famille et du mariage.
Mais il nous instruit aussi sur l’importance des anges pour protéger, former et guider les hommes.
Chapitre 1
Tobie, de la tribu et d’une ville de Nephthali, qui est dans la haute Galilée au-dessus de Naasson, derrière le chemin qui conduit à l’occident, ayant à sa gauche la ville de Séphet, fut emmené captif au temps de Salmanasar, roi des Assyriens ; et, même dans sa captivité, il n’abandonna pas la voie de la vérité ; en sorte qu’il distribuait tous les jours ce qu’il pouvait avoir à ses frères, à ceux de sa nation qui étaient captifs avec lui.
Et quoiqu’il fût le plus jeune de tous dans la tribu de Nephthali, il ne fit rien paraître de puéril dans ses actes.
Car lorsque tous allaient aux veaux d’or que Jéroboam, roi d’Israël, avait faits, il fuyait seul la compagnie de tous.
Et il allait à Jérusalem au temple du Seigneur, et il y adorait le Seigneur, le Dieu d’Israël, offrant fidèlement les prémices et les dîmes de tous ses biens, et, la troisième année, il distribuait toute sa dîme aux prosélytes et aux étrangers. Il observait ces choses et d’autres semblables conformément à la loi de Dieu, n’étant encore qu’un enfant.
Mais, lorsqu’il fut devenu homme, il épousa une femme de sa tribu, nommée Anne, et en eut un fils auquel il donna son nom. Et il lui apprit dès son enfance à craindre Dieu, et à s’abstenir de tout péché.
Lors donc qu’ayant été emmené captif avec sa femme, son fils et toute sa tribu, il fut arrivé dans la ville de Ninive, quoique tous mangeassent des mets des gentils, il garda néanmoins son âme, et il ne se souilla jamais de leurs mets.
Et parce qu’il se souvint de Dieu de tout son cœur, Dieu lui fit trouver grâce devant le roi Salmanasar, qui lui donna pouvoir d’aller partout où il voudrait, et la liberté de faire ce qu’il lui plairait.
Il allait donc trouver tous ceux qui étaient captifs, et leur donnait des avis salutaires.
Or il vint à Ragès, ville des Mèdes, ayant dix talents d’argent qui provenaient des dons qu’il avait reçus du roi.
Et parmi le grand nombre de ceux de sa race, voyant que Gabélus, qui était de sa tribu, était dans le besoin, il lui donna sous son seing cette somme d’argent.
Mais, longtemps après, le roi Salmanasar étant mort, et Sennachérib, son fils, qui régna après lui, ayant une grande haine contre les fils d’Israël, Tobie allait visiter presque tous les jours tous ceux de sa parenté, les consolait, et distribuait de son bien à chacun d’eux selon son pouvoir.
Il nourrissait ceux qui avaient faim, il donnait des vêtements à ceux qui étaient nus, et ensevelissait soigneusement ceux qui étaient morts ou qui avaient été tués.
Car le roi Sennachérib étant revenu de la Judée, fuyant la plaie dont Dieu l’avait frappé pour ses blasphèmes, il faisait tuer dans sa colère beaucoup des fils d’Israël, et Tobie ensevelissait leurs corps.
Mais, lorsque le roi l’apprit, il ordonna de le tuer, et il lui ôta tout son bien.
Alors Tobie s’enfuit avec son fils et sa femme, et, dépouillé de tout, il put se cacher, parce qu’un grand nombre l’aimaient.
Quarante-cinq jours après, le roi fut tué par ses fils ; et Tobie revint dans sa maison, et on lui rendit tout son bien.
Chapitre 2
Or, après cela, comme c’était un jour de fête du Seigneur, un grand repas fut préparé dans la maison de Tobie ; et il dit à son fils : Allez, et amenez quelques-uns de notre tribu qui craignent Dieu, afin qu’ils mangent avec nous.
Son fils partit, et revint lui annoncer qu’un des fils d’Israël gisait égorgé dans la rue. Tobie se leva aussitôt de table, et laissant là le repas, arriva à jeun auprès du cadavre. Il l’enleva et l’emporta secrètement dans sa maison, afin de l’ensevelir avec précaution lorsque le soleil serait couché.
Et après avoir caché le corps, il se mit à manger avec larmes et tremblement, se souvenant de cette parole que le Seigneur avait dite par le prophète Amos : Vos jours de fête se changeront en lamentation et en deuil. Et lorsque le soleil fut couché, il alla l’ensevelir.
Or tous ses proches le blâmaient, en disant : Déjà, pour ce sujet, on a ordonné de vous faire mourir, et vous n’avez échappé qu’avec peine à l’arrêt de mort, et de nouveau vous ensevelissez les morts ?
Mais Tobie, craignant plus Dieu que le roi, emportait les corps de ceux qui avaient été tués, les cachait dans sa maison, et les ensevelissait au milieu de la nuit.
Or il arriva un jour que, s’étant fatigué à ensevelir les morts, il revint dans sa maison, se coucha près d’une muraille et s’endormit ; et pendant qu’il dormait, il tomba d’un nid d’hirondelle de la fiente chaude sur ses yeux ; ce qui le rendit aveugle.
Dieu permit que cette épreuve lui arrivât, pour que sa patience servît d’exemple à la postérité, comme celle du saint homme Job.
Car, ayant toujours craint Dieu dès son enfance, et ayant gardé ses commandements, il ne s’attrista pas contre Dieu de ce qu’Il l’avait affligé par cette cécité ; mais il demeura immobile dans la crainte du Seigneur, rendant grâces à Dieu tous les jours de sa vie.
Et de même que des rois insultaient au bienheureux Job, ainsi ses parents et ses proches se raillaient de sa conduite, en disant :
Où est votre espérance pour laquelle vous faisiez tant d’aumônes et de sépultures ?
Mais Tobie, les reprenant, leur disait : Ne parlez pas ainsi ; car nous sommes enfants des Saints, et nous attendons cette vie que Dieu doit donner à ceux qui ne changent jamais leur foi envers lui.
Mais Anne, sa femme, allait tous les jours faire de la toile, et apportait du travail de ses mains ce qu’elle pouvait gagner pour vivre.
Il arriva donc qu’ayant reçu un jour un chevreau, elle l’apporta à la maison. Et son mari, l’ayant entendu bêler, dit : Prenez garde qu’il n’ait été dérobé ; rendez-le à ses maîtres, car il ne nous est pas permis de manger ou de toucher ce qui a été dérobé.
Alors sa femme lui répondit avec colère : Il est évident que votre espérance était vaine, et voilà le résultat de vos aumônes.
C’est ainsi, et par d’autres paroles semblables, qu’elle lui insultait.
Chapitre 3
Alors Tobie gémit et commença à prier avec larmes, en disant : Seigneur, vous êtes juste ; tous vos jugements sont équitables, et toutes vos voies sont miséricorde, et vérité, et justice.
Et maintenant, Seigneur, souvenez-vous de moi, ne prenez point vengeance de mes péchés, et ne vous souvenez pas de mes fautes, ni de celles de mes pères.
Nous n’avons point obéi à vos préceptes ; c’est pourquoi nous avons été livrés au pillage, à la captivité et à la mort, et nous sommes devenus la risée de toutes les nations parmi lesquelles vous nous avez dispersés.
Et maintenant, Seigneur, vos jugements sont grands, parce que nous n’avons pas agi selon vos préceptes, et que nous n’avons pas marché sincèrement devant vous.
Et maintenant, Seigneur, traitez-moi selon votre volonté, et commandez que mon âme soit reçue en paix ; car il vaut mieux pour moi mourir que vivre.
En ce même jour, il arriva que Sara, fille de Raguël, à Ragés, ville des Mèdes, entendit, elle aussi, les injures d’une des servantes de son père.
Car elle avait été donnée en mariage à sept maris, et un démon, nommé Asmodée, les avait tués aussitôt qu’ils s’étaient approchés d’elle.
Comme donc elle reprenait cette servante pour quelque faute, celle-ci lui répondit : Que jamais nous ne voyons de toi ni fils ni fille sur la terre, ô meurtrière de tes maris !
Ne veux-tu point me tuer aussi, comme tu as déjà tué sept maris ? À cette parole, Sara monta dans une chambre haute de la maison, où elle demeura trois jours et trois nuits sans boire ni manger.
Mais, persévérant dans la prière, elle demandait à Dieu avec larmes qu’Il la délivrât de cet opprobre.
Or il arriva que, le troisième jour, achevant sa prière, et bénissant le Seigneur, elle dit : que votre nom soit béni, Dieu de nos pères, qui faites miséricorde après vous être irrité, et qui au temps de l’affliction pardonnez les péchés à ceux qui vous invoquent.
Vers vous, Seigneur, je tourne mon visage, vers vous je dirige mes yeux.
Je vous demande, Seigneur, de me délivrer du lien de cet opprobre, ou de me retirer de dessus la terre.
Vous savez, Seigneur, que je n’ai jamais désiré un mari, et que j’ai conservé mon âme pure de toute concupiscence.
Je ne me suis jamais mêlée avec ceux qui aiment à se divertir, et je n’ai jamais eu aucun commerce avec ceux qui se conduisent avec légèreté.
Si j’ai consenti à recevoir un mari, c’est dans votre crainte, et non par passion.
Et, ou j’ai été indigne d’eux, ou peut-être n’étaient-ils pas dignes de moi, parce que vous m’avez peut-être réservée pour un autre époux.
Car votre conseil n’est pas au pouvoir de l’homme.
Mais quiconque vous honore est sûr que, si vous l’éprouvez pendant sa vie, il sera couronné ; si vous l’affligez, il sera délivré ; et si vous le châtiez, il aura accès auprès de votre miséricorde.
Car vous ne prenez pas plaisir à notre perte ; mais, après la tempête, vous ramenez le calme ; et après les larmes et les pleurs, vous nous comblez de joie.
Que votre nom, ô Dieu d’Israël, soit béni dans tous les siècles.
Ces prières de tous deux furent exaucées en même temps devant la gloire du Dieu suprême ; et le saint Ange du Seigneur, Raphaël, fut envoyé pour les guérir tous deux, eux dont les prières avaient été présentées au Seigneur en même temps.
Chapitre 4
Tobie, croyant donc que Dieu exaucerait la prière qu’il lui avait faite de pouvoir mourir, appela à lui son fils Tobie, et lui dit : Mon fils, écoutez les paroles de ma bouche, et posez-les dans votre cœur comme un fondement.
Lorsque Dieu aura reçu mon âme, ensevelissez mon corps, et honorez votre mère tous les jours de sa vie ; car vous devez vous souvenir des nombreux et grands périls qu’elle a soufferts lorsqu’elle vous portait dans son sein.
Et quand elle-même aussi aura achevé le temps de sa vie, ensevelissez-la auprès de moi.
Ayez Dieu dans l’esprit tous les jours de votre vie, et gardez-vous de consentir jamais au péché, et de violer les préceptes du Seigneur notre Dieu.
Faites l’aumône de votre bien, et ne détournez votre visage d’aucun pauvre ; car ainsi il arrivera que le visage du Seigneur ne se détournera pas de vous.
Soyez charitable de la manière que vous le pourrez.
Si vous avez beaucoup, donnez abondamment ; si vous avez peu, ayez soin de donner de bon cœur de ce peu. Car vous vous amasserez une grande récompense pour le jour de la nécessité.
Car l’aumône délivre de tout péché et de la mort, et elle ne laissera pas tomber l’âme dans les ténèbres. L’aumône sera le sujet d’une grande confiance devant le Dieu suprême, pour tous ceux qui l’auront faite.
Gardez-vous, mon fils, de toute fornication ; et hors votre épouse, ne vous permettez pas de commettre le crime.
Ne souffrez jamais que l’orgueil domine dans vos pensées ou dans vos paroles, car c’est par lui que tous les maux ont commencé.
Lorsque quelqu’un aura travaillé pour vous, payez-lui aussitôt son salaire, et que la récompense du mercenaire ne demeure jamais chez vous.
Ce que vous seriez fâché qu’on vous fît, prenez garde de jamais le faire à autrui.
Mangez votre pain avec les pauvres et avec ceux qui ont faim, et couvrez de vos vêtements ceux qui sont nus.
Employez votre pain et votre vin à la sépulture du juste, et gardez-vous d’en manger et d’en boire avec les pécheurs.
Demandez toujours conseil à un homme sage.
Bénissez Dieu en tout temps, et demandez-Lui qu’Il dirige vos voies, et que tous vos desseins demeurent fermes en Lui.
Je vous avertis aussi, mon fils, que lorsque vous n’étiez qu’un petit enfant, j’ai donné dix talents d’argent à Gabélus, de Ragès, ville des Mèdes, et que j’ai sa promesse entre les mains.
C’est pourquoi cherchez de quelle manière vous parviendrez jusqu’à lui, pour retirer de lui cette somme d’argent et lui rendre son obligation.
Ne craignez point, mon fils : il est vrai que nous menons une vie pauvre ; mais nous aurons beaucoup de biens si nous craignons Dieu, et si nous nous écartons de tout péché, et si nous faisons de bonnes œuvres.
Chapitre 5
Alors Tobie répondit à son père, et lui dit : Mon père, je ferai tout ce que vous m’avez ordonné.
Mais je ne sais comment je retirerai cet argent. Cet homme ne me connaît pas, et je ne le connais pas non plus ; quelle preuve lui donnerai-je ? Je n’ai même jamais connu le chemin par où l’on va là-bas.
Alors son père lui répondit, et lui dit : J’ai son obligation entre les mains, et aussitôt que vous la lui aurez montrée, il vous rendra l’argent.
Mais allez maintenant, et cherchez quelque homme fidèle qui aille avec vous moyennant un salaire, afin que vous receviez cet argent pendant que je vis encore.
Alors Tobie, étant sorti, trouva un beau jeune homme debout, ceint et comme prêt à marcher.
Et ignorant que c’était un Ange de Dieu, il le salua, et dit : D’où venez-vous, bon jeune homme ?
Il répondit : D’avec les fils d’Israël. Tobie lui dit : Connaissez-vous le chemin qui conduit au pays des Mèdes ?
Et il lui répondit : Je le connais ; j’ai souvent parcouru tous ces chemins, et j’ai demeuré chez Gabélus notre frère, qui demeure à Ragès, ville des Mèdes, qui est situé dans la montagne d’Ecbatane.
Tobie lui dit : Attendez-moi, je vous prie, jusqu’à ce que j’aie annoncé ces choses à mon père.
Alors Tobie, étant rentré, raconta tout cela à son père ; sur quoi le père, saisi d’admiration, demanda que ce jeune homme entrât auprès de lui.
Étant donc entré, il salua Tobie, et dit : Que la joie soit toujours avec vous.
Tobie répondit : Quelle joie puis-je avoir, moi qui suis dans les ténèbres, et qui ne vois point la lumière du ciel ?
Le jeune homme lui dit : Ayez bon courage, le temps approche où Dieu doit vous guérir.
Alors Tobie lui dit : Pourrez-vous conduire mon fils chez Gabélus à Ragès, ville des Mèdes ? Et quand vous serez de retour, je vous donnerai ce qui vous sera dû.
L’Ange lui dit : Je le conduirai, et le ramènerai auprès de vous.
Tobie lui répondit : Indiquez-moi, je vous prie, de quelle famille vous êtes, ou de quelle tribu.
L’Ange Raphaël lui dit : Cherchez-vous la famille du mercenaire qui doit conduire votre fils, ou le mercenaire lui-même ?
Mais, de peur que je ne vous donne de l’inquiétude, je suis Azarias, fils du grand Ananias.
Et Tobie répondit : vous êtes d’une race illustre. Mais je vous prie de ne pas vous fâcher, si j’ai désiré connaître votre race.
L’Ange lui dit : Je conduirai votre fils en bonne santé, et le ramènerai de même.
Tobie lui répondit : Faites bon voyage ; que Dieu soit dans votre chemin, et que Son Ange vous accompagne.
Alors, ayant préparé tout ce qu’ils devaient porter dans le voyage, Tobie dit adieu à son père et à sa mère, et ils se mirent en chemin tous deux ensemble.
Et lorsqu’ils furent partis, sa mère commença à pleurer et à dire : vous nous avez ôté le bâton de notre vieillesse, et vous l’avez éloigné de nous. Plût à Dieu que cet argent, pour lequel vous l’avez envoyé, n’eût jamais existé ! Car notre pauvreté nous suffisait, et nous pouvions regarder comme une grande richesse de voir notre fils.
Et Tobie lui dit : Ne pleurez point ; notre fils arrivera sain et sauf, et il reviendra sain et sauf, et vos yeux le verront.
Car je crois que le bon Ange de Dieu l’accompagne, et qu’il dispose bien tout ce qui le concerne, et qu’ainsi il reviendra vers nous avec joie.
À cette parole, sa mère cessa de pleurer, et elle se tut.
Chapitre 6
Tobie partit donc, et le chien le suivit ; et il demeura la première nuit près du fleuve du Tigre.
Et il sortit pour se laver les pieds, et voici qu’un énorme poisson s’avança pour le dévorer. Tobie, plein d’effroi, jeta un grand cri, en disant : Seigneur, il va se jeter sur moi.
Et l’Ange lui dit : Prenez-le par les ouïes, et tirez-le à vous. Ce qu’ayant fait, il le tira à terre, et le poisson commença à se débattre à ses pieds.
Alors l’Ange lui dit : Videz ce poisson, et prenez-en le cœur, le fiel et le foie, car ils vous seront nécessaires pour des remèdes très utiles.
Ce qu’ayant fait, il fit rôtir une partie de la chair, qu’ils emportèrent avec eux en chemin ; ils salèrent le reste, qui leur devait suffire jusqu’à ce qu’ils arrivassent à Ragès, ville des Mèdes.
Alors Tobie interrogea l’Ange, et lui dit : Mon frère Azarias, je vous supplie de me dire quel remède l’on peut tirer de ce que vous m’avez ordonné de garder du poisson.
Et l’Ange, lui répondant, lui dit : Si vous mettez sur des charbons une partie de son cœur, sa fumée chasse toute sorte de démons, soit d’un homme, soit d’une femme, en sorte qu’ils ne s’en approchent plus.
Et le fiel est bon pour oindre les yeux où il y a quelque taie, et il les guérit.
Et Tobie lui dit : Où voulez-vous que nous logions ?
L’Ange lui répondit : Il y a ici un homme du nom de Raguël, votre parent et de votre tribu. Il a une fille nommée Sara ; mais il n’a pas de fils, ni d’autre fille que celle-là.
Tout son bien vous sera dû, et il faut que vous la preniez pour épouse.
Demandez-la donc à son père, et il vous la donnera en mariage.
Alors Tobie répondit et dit : J’ai entendu dire qu’elle avait déjà épousé sept maris, et qu’ils sont morts ; et j’ai entendu dire aussi qu’un démon les avait tués.
Je crains donc que la même chose ne m’arrive à moi-même, et que, comme je suis fils unique de mes parents, je ne précipite de chagrin leur vieillesse au tombeau.
Alors l’Ange Raphaël lui dit : Écoutez-moi, et je vous apprendrai quels sont ceux sur qui le démon a du pouvoir.
Ce sont ceux qui s’engagent dans le mariage de manière à bannir Dieu de leur cœur et de leur esprit, et qui ne pensent qu’à leur passion, comme le cheval et le mulet qui sont sans raison ; le démon a du pouvoir sur ceux-là.
Mais pour vous, lorsque vous l’aurez épousée, étant entré dans la chambre, vivez avec elle dans la continence pendant trois jours, et ne pensez à autre chose qu’à prier avec elle.
Cette même nuit, mettez dans le feu le foie du poisson, et le démon s’enfuira.
La seconde nuit, vous serez admis dans la société des saints patriarches.
La troisième nuit, vous recevrez la bénédiction de Dieu, afin qu’il naisse de vous des enfants en parfaite santé.
La troisième nuit passée, vous prendrez cette jeune fille dans la crainte du Seigneur, et guidé par le désir d’avoir des enfants plutôt que par la passion, afin que vous obteniez la bénédiction de Dieu, en ayant des enfants de la race d’Abraham.
Chapitre 7
Or ils entrèrent chez Raguël, qui les reçut avec joie.
Et Raguël, regardant Tobie, dit à Anne sa femme : Que ce jeune homme ressemble à mon cousin !
Après cela il leur dit : D’où êtes-vous, jeunes gens nos frères ? Ils lui dirent : Nous sommes de la tribu de Nephthali, du nombre des captifs de Ninive.
Et Raguël leur dit : Connaissez-vous mon frère Tobie ? Ils lui dirent : Nous le connaissons.
Et comme Raguël en disait beaucoup de bien, l’Ange lui dit : Tobie, dont vous nous demandez des nouvelles, est le père de ce jeune homme.
Et Raguël, s’avançant aussitôt, le baisa avec larmes, et pleurant sur son cou,
il dit : Soyez béni, mon fils ; car vous êtes le fils d’un homme de bien, du meilleur des hommes.
Et Anne sa femme et Sara leur fille se mirent à pleurer.
Et, après cet entretien, Raguël ordonna qu’on tuât un bélier et qu’on préparât le festin. Et comme il les priait de se mettre à table,
Tobie dit : Je ne mangerai et ne boirai point ici aujourd’hui, que vous ne m’ayez accordé ma demande, et que vous ne me promettiez de me donner Sara, votre fille.
À ces mots, Raguël fut saisi de frayeur, sachant ce qui était arrivé aux sept maris qui s’étaient approchés d’elle, et il commença à craindre que la même chose n’arrivât aussi à celui-ci. Et comme il hésitait, et ne répondait rien à la demande de Tobie, l’Ange lui dit : Ne craignez pas de la donner à ce jeune homme, car il craint Dieu, et c’est à lui que votre fille est due comme épouse ; c’est pourquoi nul autre n’a pu la posséder.
Alors Raguël dit : Je ne doute pas que Dieu n’ait admis mes prières et mes larmes en sa présence.
Et je crois qu’Il vous a fait venir afin que cette fille épousât quelqu’un de sa parenté selon la loi de Moïse ; et ainsi ne doutez pas que je ne vous donne ma fille comme vous le désirez.
Et prenant la main droite de sa fille, il la mit dans la main droite de Tobie, et dit : Que le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob soit avec vous ; que Lui-même vous unisse, et qu’Il accomplisse sa bénédiction en vous.
Et ayant pris du papier, ils écrivirent l’acte de mariage.
Et après cela, ils mangèrent en bénissant Dieu.
Et Raguël appela Anne, sa femme, et lui ordonna de préparer une autre chambre.
Et elle y conduisit Sara, sa fille, qui se mit à pleurer.
Et elle lui dit : Aie bon courage, ma fille. Que le Seigneur du ciel compense en joie le chagrin que tu as éprouvé.
Chapitre 8
Après qu’ils eurent soupé, ils firent entrer le jeune homme auprès d’elle.
Alors Tobie, se souvenant des paroles de l’Ange, tira de son sac une partie du foie du poisson, et la mit sur des charbons ardents.
Alors l’Ange Raphaël saisit le démon, et le lia dans le désert de la haute Égypte.
Et Tobie exhorta la jeune fille et lui dit : Sara, levez-vous et prions Dieu aujourd’hui, et demain, et après-demain, car durant ces trois nuits nous nous unirons à Dieu ; et après la troisième nuit, nous vivrons dans notre mariage.
Car nous sommes les enfants des Saints, et nous ne pouvons pas nous unir comme des païens, qui ne connaissent pas Dieu.
S’étant donc levés tous deux, ils prièrent Dieu ensemble avec instance, afin qu’Il les conservât sains et saufs.
Et Tobie dit : Seigneur, Dieu de nos pères, que les cieux et la terre, la mer, les fontaines et les fleuves, avec toutes vos créatures qu’ils renferment, vous bénissent.
Vous avez fait Adam du limon de la terre, et vous lui avez donné Ève pour auxiliaire.
Et maintenant, Seigneur, vous savez que ce n’est point pour satisfaire ma passion que je prends ma sœur pour épouse, mais dans le seul désir d’une postérité par laquelle votre nom soit béni dans tous les siècles.
Sara dit aussi : Ayez pitié de nous, Seigneur, ayez pitié de nous, et faites que nous vieillissions tous deux ensemble dans une parfaite santé.
Or, vers le chant du coq, Raguël ordonna qu’on fît venir ses serviteurs, et ils s’en allèrent avec lui pour creuser une fosse.
Car il disait : Il lui sera peut-être arrivé la même chose qu’à ces sept hommes qui sont entrés auprès d’elle.
Et lorsqu’ils eurent préparé la fosse, Raguël, étant revenu près de sa femme, lui dit :
Envoyez une de vos servantes pour voir s’il est mort, afin que je l’ensevelisse avant qu’il fasse jour.
Et Anne envoya une de ses servantes, qui, étant entrée dans la chambre, les trouva sains et saufs, dormant ensemble.
Et elle revint et annonça cette bonne nouvelle. Alors Raguël et Anne, sa femme, bénirent le Seigneur, et dirent : Nous vous bénissons, Seigneur, Dieu d’Israël, parce que ce que nous avions pensé ne nous est point arrivé ; car vous nous avez fait miséricorde, et vous avez chassé loin de nous l’ennemi qui nous persécutait, et vous avez eu pitié de ces deux enfants uniques. Faites, Seigneur, qu’ils vous bénissent encore davantage, et qu’ils vous offrent un sacrifice de louange pour leur préservation, afin que toutes les nations connaissent que vous seul êtes Dieu sur toute la terre.
Et aussitôt Raguël ordonna à ses serviteurs de remplir avant le jour la fosse qu’ils avaient faite.
Il dit aussi à sa femme de préparer un festin, et tous les vivres nécessaires à ceux qui entreprennent un voyage.
Et il fit tuer deux vaches grasses et quatre moutons, pour préparer un festin à tous ses voisins et à tous ses amis.
Raguël conjura ensuite Tobie de demeurer avec lui pendant deux semaines.
Il lui donna la moitié de tout ce qu’il possédait, et déclara par un écrit que l’autre moitié qui restait reviendrait à Tobie après sa mort.
Chapitre 9
Alors Tobie appela auprès de lui l’Ange, qu’il croyait un homme, et il lui dit : Mon frère Azarias, je vous prie d’écouter mes paroles.
Quand je me donnerais à vous comme esclave, je ne pourrais pas reconnaître dignement tous vos soins.
Néanmoins je vous conjure de prendre avec vous des serviteurs et des montures, et d’aller trouver Gabélus à Ragès, ville des Mèdes, pour lui rendre son obligation et recevoir de lui l’argent, et pour le prier de venir à mes noces.
Car vous savez que mon père compte les jours, et si je tarde un jour de plus, son âme sera accablée d’ennui.
Vous voyez aussi de quelle manière Raguël m’a conjuré, et que je ne puis résister à ses instances.
Raphaël prit donc quatre serviteurs de Raguël et deux chameaux, et s’en alla à Ragès, ville des Mèdes, et ayant trouvé Gabélus, il lui rendit son obligation et reçut de lui tout l’argent.
Il lui raconta aussi tout ce qui était arrivé au jeune Tobie, et il le fit venir avec lui aux noces.
Et lorsque Gabélus fut entré dans la maison de Raguël, il trouva Tobie à table ; celui-ci se leva, et ils s’embrassèrent l’un l’autre, et Gabélus pleura et bénit Dieu, en disant : Que le Dieu d’Israël vous bénisse, car vous êtes le fils d’un homme très vertueux et juste, qui craint Dieu et fait beaucoup d’aumônes.
Que la bénédiction se répande aussi sur votre femme et sur vos parents.
Puissiez-vous voir vos fils, et les fils de vos fils, jusqu’à la troisième et la quatrième génération, et que votre race soit bénie du Dieu d’Israël, qui règne dans les siècles des siècles.
Et tous ayant répondu : Amen, ils se mirent à table ; mais dans le festin même des noces ils se conduisirent avec la crainte du Seigneur.
Chapitre 10
Pendant que Tobie différait son départ à cause de ses noces, son père s’inquiétait et disait : D’où peut venir ce retard de mon fils, et qui peut le retenir là-bas ?
Ne serait-ce pas que Gabélus est mort, et qu’il ne se trouve personne pour lui rendre l’argent ?
Il commença donc à s’attrister vivement, et Anne, sa femme, avec lui ; et ils se mirent ensemble à pleurer de ce que leur fils n’était pas revenu auprès d’eux au jour marqué.
Mais sa mère surtout versait des larmes inconsolables, et elle disait : Hélas ! hélas ! mon fils, pourquoi vous avons-nous envoyé si loin, vous la lumière de nos yeux, le bâton de notre vieillesse, la consolation de notre vie et l’espérance de notre postérité ?
Nous ne devions pas vous éloigner de nous, puisque vous seul nous teniez lieu de toutes choses.
Tobie lui disait : Taisez-vous, et ne vous troublez pas ; notre fils se porte bien ; cet homme avec qui nous l’avons envoyé est très fidèle.
Mais rien ne pouvait la consoler ; et, sortant tous les jours de sa maison, elle regardait de tous côtés, et allait dans tous les chemins par lesquels elle espérait qu’il pourrait revenir pour tâcher de le découvrir de loin quand il reviendrait.
Cependant Raguël disait à son gendre : Demeurez ici, et j’enverrai à Tobie votre père des nouvelles de votre santé.
Tobie lui répondit : Je sais que mon père et ma mère comptent maintenant les jours, et qu’ils sont accablés de chagrin.
Et comme Raguël priait Tobie avec de grandes instances, et que celui-ci refusait de consentir, il lui remit Sara et la moitié de tout ce qu’il possédait en serviteurs, en servantes, en troupeaux, en chameaux, en vaches, et une grande quantité d’argent, et il le laissa partir plein de santé et de joie, en lui disant : Que le saint Ange du Seigneur soit en votre chemin ; qu’il vous conduise sains et saufs, et puissiez-vous trouver votre père et votre mère en bon état, et que mes yeux voient vos enfants avant que je meure.
Et les parents, prenant leur fille, la baisèrent et la laissèrent aller, l’avertissant d’honorer son beau-père et sa belle-mère, d’aimer son mari, de régler sa famille, de gouverner sa maison, de se conserver elle-même irrépréhensible.
Chapitre 11
Et comme ils s’en retournaient, ils arrivèrent le onzième jour à Charan, qui est à moitié chemin dans la direction de Ninive.
Et l’Ange dit : Mon frère Tobie, vous savez en quel état vous avez laissé votre père.
Si donc cela vous plaît, allons en avant, et que vos serviteurs suivent lentement avec votre femme et vos troupeaux.
Et comme il lui plut d’aller ainsi, Raphaël dit à Tobie : Prenez avec vous du fiel du poisson, car vous en aurez besoin. Tobie prit donc de ce fiel, et ils partirent.
Anne cependant allait tous les jours s’asseoir près du chemin, sur le haut d’une montagne, d’où elle pouvait découvrir de loin.
Et comme elle regardait de ce lieu si son fils arrivait, elle l’aperçut de loin, et elle le reconnut aussitôt, et elle courut l’annoncer à son mari, et lui dit : Voilà que votre fils revient.
Et Raphaël dit à Tobie : Dès que vous serez entré dans votre maison, adorez aussitôt le Seigneur votre Dieu ; et Lui rendant grâces, approchez-vous de votre père, et baisez-le.
Et aussitôt frottez-lui les yeux avec ce fiel de poisson que vous portez sur vous. Car sachez que bientôt ses yeux s’ouvriront, et que votre père verra la lumière du ciel, et se réjouira en vous voyant.
Alors le chien, qui les avait suivis durant le voyage, courut devant eux ; et arrivant comme un messager, il témoignait sa joie par le mouvement de sa queue et ses caresses.
Et le père aveugle se leva et se mit à courir, trébuchant à chaque pas ; et donnant la main à un serviteur, il s’avança au-devant de son fils.
Et le rencontrant, il l’embrassa, et sa mère ensuite ; et ils commencèrent tous deux à pleurer de joie.
Puis, lorsqu’ils eurent adoré Dieu et Lui eurent rendu grâces, ils s’assirent.
Alors Tobie, prenant du fiel du poisson, en frotta les yeux de son père. Et il attendit environ une demi-heure, et une petite peau blanche, semblable à la membrane d’un œuf, commença à sortir de ses yeux.
Et Tobie, la prenant, la tira des yeux de son père, qui recouvra aussitôt la vue.
Et ils rendirent gloire à Dieu, lui et sa femme, et tous ceux qui le connaissaient.
Et Tobie disait : Je vous bénis, Seigneur, Dieu d’Israël, de ce que vous m’avez châtié et guéri ; et voici que je vois Tobie, mon fils.
Sept jours plus tard, Sara, la femme de son fils, arriva aussi avec toute sa famille en parfaite santé, et aussi les troupeaux et les chameaux, et tout l’argent de la femme, et aussi l’argent que Gabélus avait rendu.
Et il raconta à ses parents tous les bienfaits dont Dieu l’avait comblé par cet homme qui l’avait conduit.
Et Achior et Nabath, cousins de Tobie, vinrent pleins de joie auprès de lui, et le félicitèrent de tous les biens que Dieu lui avait faits.
Et tous firent festin durant sept jours, et ils se réjouirent d’une grande joie.
Chapitre 12
Alors Tobie appela son fils auprès de lui, et lui dit : Que pouvons-nous donner à ce saint homme qui est venu avec vous ?
Tobie répondant à son père, lui dit : Mon père, quelle récompense lui donnerons-nous ? ou que peut-il y avoir de proportionné à ses bienfaits ?
Il m’a mené et ramené sain et sauf ; il a lui-même reçu l’argent de Gabélus ; il m’a fait avoir une épouse ; il a éloigné d’elle le démon ; il a rempli de joie ses parents ; il m’a délivré du poison qui allait me dévorer ; il vous a fait voir à vous-même la lumière du ciel ; et c’est par lui que nous avons été remplis de tous les biens. Que lui donnerons-nous qui égale ce qu’il a fait pour nous ?
Mais je vous prie, mon père, de lui demander s’il daignerait accepter la moitié de tout le bien que nous avons apporté.
Alors Tobie le père et son fils l’appelèrent, et l’ayant pris à part, ils le conjurèrent de vouloir bien recevoir la moitié de tout ce qu’ils avaient apporté.
Alors l’Ange leur dit en secret : Bénissez le Dieu du ciel, et glorifiez-Le devant tous les hommes, parce qu’il a fait éclater sur vous sa miséricorde.
Car il est bon de cacher le secret du roi, mais il est honorable de révéler et de publier les œuvres de Dieu.
La prière accompagnée du jeûne est bonne, et l’aumône vaut mieux que d’amasser des monceaux d’or.
Car l’aumône délivre de la mort, et c’est elle qui efface les péchés, et qui fait trouver la miséricorde et la vie éternelle.
Mais ceux qui commettent le péché et l’iniquité sont les ennemis de leur âme.
Je vais donc vous découvrir la vérité, et je ne vous cacherai point une chose qui est secrète.
Lorsque vous priiez avec larmes, et que vous ensevelissiez les morts, que vous quittiez votre repas, et que vous cachiez les morts dans votre maison durant le jour pour les ensevelir pendant la nuit, j’ai présenté votre prière au Seigneur.
Et parce que vous étiez agréable à Dieu, il a été nécessaire que la tentation vous éprouvât.
Et maintenant le Seigneur m’a envoyé pour vous guérir, et pour délivrer du démon Sara, la femme de votre fils.
Car je suis l’Ange Raphaël, l’un des sept qui nous tenons en la présence du Seigneur.
Lorsqu’ils eurent entendu ces paroles, ils furent troublés, et, saisis de frayeur, ils tombèrent le visage contre terre.
Et l’Ange leur dit : La paix soit avec vous, ne craignez point.
Car, lorsque j’étais avec vous, j’y étais par la volonté de Dieu ; bénissez-Le et chantez-Le.
Il vous a paru que je mangeais et que je buvais avec vous ; mais je me nourris d’un mets invisible, et d’un breuvage qui ne peut être vu des hommes.
Il est donc temps que je retourne vers Celui qui m’a envoyé ; pour vous, bénissez Dieu et publiez toutes ses merveilles.
Et lorsqu’il eut ainsi parlé, il disparut de devant eux, et ils ne purent plus le voir.
Alors, s’étant prosternés le visage contre terre pendant trois heures, ils bénirent Dieu, et s’étant levés, ils racontèrent toutes ses merveilles.
Chapitre 13
Alors Tobie l’ancien, ouvrant la bouche, bénit le Seigneur, et il dit : Vous êtes grand, Seigneur, dans l’éternité ; et votre règne s’étend à tous les siècles.
Car vous châtiez et vous sauvez, vous conduisez jusqu’au tombeau, et vous en ramenez, et nul ne peut se soustraire à votre main.
Rendez grâces au Seigneur, fils d’Israël, et louez-le devant les nations ;
car Il vous a dispersés parmi les peuples qui L’ignorent, afin que vous publiiez ses merveilles, et que vous leur appreniez qu’il n’y a pas d’autre Dieu tout-puissant, si ce n’est Lui.
C’est Lui qui nous a châtiés à cause de nos iniquités ; et c’est Lui qui nous sauvera à cause de sa miséricorde.
Considérez donc la manière dont Il nous a traités, et bénissez-Le avec crainte et tremblement, et exaltez par vos œuvres le Roi des siècles.
Pour moi je Le bénirai sur cette terre où je suis captif, parce qu’Il a fait éclater sa majesté sur une nation criminelle.
Convertissez-vous donc, pécheurs, et pratiquez la justice devant Dieu, et croyez qu’Il vous fera miséricorde.
Mais moi et mon âme, nous nous réjouirons en Lui.
Bénissez le Seigneur, vous tous ses élus ; célébrez des jours de joie, et rendez-Lui des actions de grâces.
Jérusalem, cité de Dieu, le Seigneur t’a châtiée à cause des œuvres de tes mains.
Rends grâces au Seigneur pour les biens qu’Il t’a faits, et bénis le Dieu des siècles, afin qu’Il rétablisse en toi Son tabernacle, et qu’Il rappelle à toi tous les captifs, et que tu te réjouisses dans tous les siècles des siècles.
Tu brilleras d’une lumière éclatante, et toutes les extrémités de la terre t’adoreront.
Les nations viendront à toi des pays lointains, et, t’apportant des présents, elles adoreront en toi le Seigneur, et considéreront ta terre comme un sanctuaire.
Car elles invoqueront le grand Nom au milieu de toi.
Ceux qui te mépriseront seront maudits ; ceux qui te blasphémeront seront condamnés, et ceux qui t’édifieront seront bénis.
Mais toi, tu te réjouiras dans tes enfants, parce qu’ils seront tous bénis, et réunis près du Seigneur.
Heureux tous ceux qui t’aiment, et qui se réjouissent de ta paix.
Mon âme, bénis le Seigneur, parce qu’Il a délivré Jérusalem, sa cité, de toutes ses tribulations, Lui le Seigneur notre Dieu.
Je serai heureux s’il reste quelqu’un de ma race pour voir la splendeur de Jérusalem.
Les portes de Jérusalem seront bâties de saphirs et d’émeraudes, et toute l’enceinte de ses murailles de pierres précieuses.
Toutes ses places publiques seront pavées de pierres blanches et pures ; et l’on chantera dans ses rues Alléluia.
Béni soit le Seigneur qui l’a exaltée, et qu’Il règne sur elle dans les siècles des siècles. Amen.
Chapitre 14
Ainsi finirent les paroles de Tobie. Et après qu’il eut recouvré la vue, il vécut quarante-deux ans, et il vit les enfants de ses petits-enfants.
Et après avoir vécu cent deux ans, il fut enseveli honorablement à Ninive.
Car il avait cinquante-six ans lorsqu’il perdit la vue, et il la recouvra à soixante.
Le reste de sa vie se passa dans la joie ; et ayant beaucoup avancé dans la crainte de Dieu, il mourut en paix.
À l’heure de sa mort, il appela Tobie son fils, et sept jeunes enfants qu’il avait, ses petits-fils, et il leur dit :
La ruine de Ninive est proche, car la parole de Dieu ne demeure pas sans effet ; et nos frères, qui auront été dispersés hors de la terre d’Israël, y retourneront.
Tout le pays désert y sera repeuplé et la maison de Dieu, qui a été brûlée, sera rebâtie de nouveau, et tous ceux qui craignent Dieu y reviendront.
Et les nations abandonneront leurs idoles, et elles viendront à Jérusalem, et elles y habiteront ; et tous les rois de la terre s’y réjouiront en adorant le roi d’Israël.
Mes enfants, écoutez donc votre père : servez le Seigneur dans la vérité, et cherchez à faire ce qui Lui est agréable.
Recommandez à vos enfants de faire des œuvres de justice et des aumônes, de se souvenir de Dieu, et de Le bénir en tout temps dans la vérité, et de toutes leurs forces.
Écoutez-moi donc maintenant, mes enfants, et ne demeurez point ici. Mais le jour même où vous aurez enseveli votre mère auprès de moi dans un même sépulcre, tournez vos pas afin de sortir d’ici.
Car je vois que l’iniquité de cette ville la fera périr.
Or il arriva qu’après la mort de sa mère Tobie sortit de Ninive avec sa femme, ses enfants et les enfants de ses enfants, et il retourna chez son beau-père et sa belle-mère.
Et il les trouva bien portants, dans une heureuse vieillesse, et il eut soin d’eux, et leur ferma les yeux ; il recueillit toute la succession de la maison de Raguël, et il vit les enfants de ses enfants jusqu’à la cinquième génération.
Et après qu’il eut vécu quatre-vingt-dix-neuf ans dans la crainte du Seigneur, ses enfants l’ensevelirent avec joie.
Et toute sa parenté et toute sa famille persévérèrent dans une bonne vie et dans une conduite sainte, de sorte qu’ils furent aimés de Dieu et des hommes, et de tous les habitants du pays.