Dom Guéranger ~L’année liturgique
Huitième dimanche après la Pentecôte.
Ce Dimanche était appelé, au moyen âge, le sixième et dernier dimanche après le Natal des Apôtres ou la fête de saint Pierre, dans les années où Pâques atteignait son dernier terme en avril. Il n’était au contraire que le premier de la série dominicale ainsi dénommée, lorsque Pâques suivait immédiatement l’équinoxe du printemps.
Nous avons vu qu’en raison du même mouvement si variable imprimé à toute la dernière partie du cycle liturgique par la date de la Solennité des solennités, cette semaine pouvait être déjà la deuxième de la lecture des livres Sapientiaux, quoique le plus souvent on doive y continuer encore celle des livres des Rois. Dans ce dernier cas, c’est l’ancien temple élevé par Salomon le Pacifique à la gloire de Jéhovah qui attire aujourd’hui l’attention de la sainte Église ; et les chants de la Messe sont alors, comme nous le verrons, en parfaite harmonie avec les lectures de l’Office de la nuit.
Saluons donc une dernière fois avant sa chute le splendide monument de l’ancienne alliance. À la veille des événements qui se préparent, l’Église veut rendre cet hommage au glorieux et divin passé qui l’a précédée. Entrons avec elle dans les sentiments des chrétiens de Juda ses premiers-nés, lorsqu’instruits du prochain accomplissement des prophéties, ils quittèrent Jérusalem par l’ordre d’en haut. Ce fut un moment solennel que celui où la petite troupe d’élus, en qui seule survivait la foi d’Abraham et l’intelligence des destinées du peuple hébreu, se retourna sur le chemin de l’émigration pour contempler, dans un long regard d’adieu, la cité de ses pères. Prenant à l’Orient la route du Jourdain, au delà duquel l’attendait le refuge préparé par Dieu aux restes d’Israël (Isaï. 10, 20-23), elle dut s’arrêter sur la pente du mont des Oliviers qui, dominant la ville, allait bientôt la dérober à ses yeux. Moins de quarante ans auparavant, au même endroit, l’Homme-Dieu s’était assis (s. Marc 13, 1-3), promenant une dernière fois, lui aussi, son regard divin sur la ville et le temple. De cette place devenue sacrée, que vénèrent encore aujourd’hui les pèlerins, Jérusalem apparaissait dans sa magnificence. Relevée depuis longtemps de ses anciennes ruines, les princes de la race d’Hérode, favoris des Romains, l’avaient encore agrandie ; elle se montrait aux yeux de nos fugitifs plus complète et plus belle qu’elle ne l’avait jamais été dans les périodes antérieures de son histoire. Rien au dehors n’annonçait encore la cité maudite. Toujours assise comme une reine forte et puissante au milieu des montagnes que le Psalmiste avait chantées (Psalm. 124, 2), couronnée de tours (Psalm. 121, 7) et pleine de palais, elle enchâssait dignement dans la triple enceinte de ses murailles achevée par les derniers rois, les plus nobles cimes des monts de Judée comme de l’univers : Sion et ses augustes souvenirs ; le Golgotha, colline obscure et pauvre que n’illuminait point encore la gloire du saint tombeau, mais dont déjà, à cette heure même, l’attraction puissante et vengeresse jetait une première fois sur cette terre les légions d’Occident ; Moriah enfin, la montagne sacrée du vieux monde, servant de base au temple sans rival dont la possession faisait de Jérusalem la plus illustre des villes de tout l’Orient pour les gentils eux‑mêmes (Plin. Hist. nat. 5, 15).
« Au lever du soleil, lorsque de loin sur la sainte montagne apparaissait le sanctuaire dominant de plus de cent coudées les deux rangées de portiques qui formaient sa double enceinte ; quand le jour versait ses premiers feux sur cette façade d’or et de marbre blanc ; quand scintillaient les mille aiguilles dorées qui surmontaient son faîte : il semblait, dit Josèphe, que ce fût une montagne de neige, s’illuminant peu à peu et s’embrasant aux feux rougeâtres du matin. L’œil était ébloui, l’âme surprise, la piété éveillée ; le païen même se prosternait (Jos. De bell. 5, 5, traduit par de Champagny). » Venu en conquérant ou comme curieux, c’était en pèlerin qu’en des temps meilleurs il reprenait sa route. Il gravissait plein d’une religieuse émotion la pente de Moriah, et pénétrait par la porte d’or dans les galeries somptueuses qui formaient l’enceinte extérieure du temple. Mêlé dans le parvis des gentils à des hommes de toute race, l’âme absorbée par la sainteté de ce lieu où l’on sentait que vivaient toujours pures les antiques traditions de l’humanité, il assistait de loin, lui profane, aux pompes divinement ordonnées du culte hébreu. La blanche colonne de la fumée des victimes s’élevait devant lui comme l’hommage de la terre au Dieu créateur et sauveur ; des parvis intérieurs arrivait à son oreille l’harmonie des chants sacrés, portant jusqu’au ciel l’ardente prière des siècles de l’attente et l’expression inspirée des espérances du monde ; et lorsque, du milieu des chœurs lévitiques et des phalanges sacerdotales vaquant au ministère du sacrifice et de la louange, le pontife au front duquel brillait la lame d’or s’avançait, portant l’encensoir, et s’engageait seul au delà des voiles mystérieux qui fermaient le sanctuaire : l’étranger qui entrevoyait quelque chose de ces symboliques splendeurs s’avouait vaincu, et il reconnaissait la grandeur incomparable de ce Dieu sans image dont la majesté dépassait tellement les vaines idoles des nations. Les princes d’Asie, les plus grands rois, tenaient à honneur de subvenir par leurs dons personnels et aux frais du trésor de leurs empires à la dépense du lieu saint (2 Mach. 3, 2-3). On vit les généraux romains et les césars eux-mêmes continuer sur ce point les traditions de Cyrus (1 Esdr. 6, 4) et d’Alexandre (Jos. Antiq. 11, 5). Auguste voulut que, chaque jour, un taureau et deux agneaux fussent offerts en son nom aux prêtres juifs et immolés sur l’autel de Jéhovah pour le salut de l’empire (Philo, Légat) ; ses successeurs avaient maintenu la fondation ; et le refus que firent les sacrificateurs de recevoir désormais les offrandes impériales marqua, dit Josèphe, le début de la guerre (Jos. De bell. 2, 17).
Mais si jusqu’à la fin la majesté du temple en imposa tellement aux profanes eux-mêmes, il était des émotions que le juif fidèle pouvait seul ressentir à son aspect, en ces derniers jours de l’existence de la nation. Héritier de la foi soumise des patriarches, il n’ignorait pas assurément que les privilèges prophétiques de sa patrie n’étaient que l’annonce pour le monde entier de grandeurs plus réelles et plus stables ; il comprenait sans nul doute que l’heure était venue, pour les enfants de Dieu, de ne plus confiner leurs hommages dans les limites resserrées d’une montagne ou d’une ville (s. Jean 4, 21, 23) ; il savait que le vrai temple de Dieu s’élevait à l’heure même sur toutes les collines de la gentilité (Isaï. 2, 2), embrassant dans son immensité les multiples rivages de cette terre qu’avait pénétrée de ses flots le sang parti du Calvaire. Et toutefois, qui ne comprendrait les angoisses de son patriotisme au moment où Dieu s’apprête à consommer, au milieu de la terre épouvantée, le retranchement terrible (Ibid. 10, 23) du peuple ingrat qui fut la part de son héritage (Deut. 32, 9) ? Qui ne s’associerait à la douleur de Jacob en ces justes, pareils dans leur petit nombre aux épis échappés à la faux du moissonneur (Isaï. 17, 5), et quittant la ville sainte devenue la cité maudite ? Certes, elles étaient bien légitimes les larmes qui tombaient des yeux de ces vrais Israélites abandonnant pour toujours à la dévastation et à la ruine leurs foyers, leur patrie, ce temple surtout qui, si longtemps, avait consacré la gloire d’Israël et formé le titre authentique de la noblesse de Juda parmi les nations (Deut. 4, 6‑8).
Indépendamment de sa prééminence au temps des prescriptions figuratives, Jérusalem n’avait-elle pas été d’ailleurs le théâtre des plus augustes mystères de la loi de la grâce ? Et n’était-ce pas en son temple que Dieu, selon l’expression des prophètes, avait manifesté l’ange de l’alliance (Malach. 3, 1) et donné la paix (Agg. 2, 10) ? L’honneur de ce temple n’est plus l’exclusif apanage d’un peuple isolé, depuis que le désiré de toutes les nations l’a rempli par son arrivée de plus de gloire que n’avaient fait tous les siècles de l’attente et de la prophétie (Agg. 2, 8, 10). C’est à son ombre que Marie, le trône futur de la Sagesse éternelle, prépara dans son âme et sa chair au Verbe divin un plus auguste sanctuaire que celui dont les murailles lambrissées de cèdre et chargées d’or abritaient son enfance. C’est là qu’à l’âge de trois ans, elle franchit joyeuse les quinze degrés qui séparaient le parvis des femmes de la porte orientale, offrant à Dieu l’hommage si pur de son cœur immaculé. Ici donc, sur la cime de Moriah, commença dans leur reine ce long défilé des vierges consacrées, qui, jusqu’à la fin des temps, viendront après elle offrir au Roi leur amour (Psalm. 44, 15, 16). Là encore, le sacerdoce nouveau prit son point de départ et son modèle en la divine Mère présentant au Très-Haut la victime du monde, fruit nouveau-né de ses chastes entrailles. Dans cette demeure faite de mains d’hommes, dans ces salles où siègent les docteurs, la Sagesse s’est assise sous les traits de l’enfance, instruisant les dépositaires de la Loi par ses questions sublimes et ses divines réponses (s. Luc 2, 46, 47). Partout, dans ces parvis, le Verbe incarné répandit des trésors de bonté, de puissance, de céleste doctrine. Tel de ces portiques fut le lieu préféré des promenades du fils de l’homme (s. Jean 10, 23), et l’Église naissante en fit le rendez-vous de ses premières assemblées (Act. 3, 11 ; 5, 12).
Véritablement donc ce lieu est saint d’une sainteté non pareille, saint pour le juif du Sinaï, saint plus encore pour le chrétien, juif ou gentil, qui trouve ici la fin de la Loi dans l’accomplissement des figures (Rom. 10, 4). L’Église rappelait à bon droit, cette nuit, la parole du Seigneur disant à Salomon : « J’ai sanctifié cette maison que vous avez bâtie, pour y établir mon Nom à jamais ; mes yeux et mon cœur y seront attachés dans toute la suite des jours (3 Reg. 11, 3) ».
Comment donc de sinistres présages viennent-ils jeter aujourd’hui l’effroi parmi les gardiens de la sainte montagne ? Des apparitions étranges, des bruits effrayants, ont banni de l’édifice sacré le calme et la paix qui conviennent à la maison du Seigneur. À la fête de la Pentecôte, les prêtres remplissant leur ministère ont entendu dans le saint lieu comme l’agitation d’une grande multitude et des voix nombreuses s’écriant toutes ensemble : « Sortons d’ici ! » Une autre fois, au milieu de la nuit, la porte d’airain massif qui fermait le sanctuaire du côté de l’Orient, et que vingt hommes à peine peuvent ébranler, s’est ouverte d’elle-même (Jos. De bell. 6, 5). O temple, ô temple, dirons-nous avec les témoins de ces menaçants prodiges (Talmud cité p. Dr. Sepp, 2ème p. 6, 62), pourquoi t’agiter ainsi ? pourquoi te détruire toi-même ? Hélas ! ton sort nous est connu ; Zacharie l’a prédit, lorsqu’il disait : « Liban, ouvre tes portes, et que le feu dévore tes cèdres (Zach. 11, 1) ! »
Dieu, à coup sûr, n’a point oublié les engagements de sa bonté toute-puissante. Mais n’oublions pas davantage le terrible et juste avertissement qui suivait sa promesse au fils de David : « Si vous abandonnez mes voies, vous et vos fils, j’exterminerai Israël de la terre que je lui ai donnée ; je rejetterai de ma face ce temple que je m’étais consacré, et Israël sera le proverbe et la fable de tous les peuples ; cette maison passera en exemple, elle sera l’objet de la stupéfaction et des sifflets de quiconque la verra (3 Reg. 9, 6-8) ! ».
Âme chrétienne, devenue pour Dieu par la grâce un temple (1 Cor. 3, 16-17) plus magnifique, plus saint, plus aimé que celui de Jérusalem, instruisez-vous à la lumière des divines vengeances, et méditez la parole de ce Dieu Très-Haut dans Ézéchiel : « La justice du juste ne le sauvera point, du jour qu’il aura fait le mal. Quand bien même je lui aurais promis la vie, si, confiant dans sa justice, il opère l’iniquité, toutes ses justices seront oubliées, et il mourra dans le péché qu’il a commis (Ézéch. 33, 12, 13). »
La multiplication des cinq pains et des deux poissons forme, chez les Grecs, le sujet de l’Évangile de ce Dimanche, qu’ils comptent pour le huitième de saint Matthieu.
À la messe
L’Introït rappelle la gloire de l’ancien temple et de la montagne sainte. Mais plus grande encore est la majesté de l’Église qui porte, en ce moment, le Nom et la louange du Très-Haut jusqu’aux extrémités de la terre, mieux que ne l’avait jamais fait ce temple qui était sa figure.
Introït
Nous avons reçu, ô Dieu, votre miséricorde au milieu de votre temple ; comme votre Nom lui-même, ô Dieu, votre louange retentit jusqu’aux extrémités de la terre ; votre main droite est pleine de justice.
Ps. Le Seigneur est grand et digne de toute louange, dans la cité de notre Dieu, sur sa montagne sainte. Gloire au Père. Nous avons reçu.
Non seulement nous sommes par nous-mêmes incapables de toute bonne œuvre, mais la pensée même du bien surnaturel ne peut se produire en nous sans le secours de la grâce. Or le plus sûr moyen d’obtenir un secours si nécessaire, est de reconnaître humblement devant Dieu le besoin absolu que nous en avons, comme le fait l’Église dans la Collecte.
Collecte
Nous vous en supplions, Seigneur, accordez-nous miséricordieusement votre Esprit qui nous fasse toujours penser dans la droiture et agir de même, afin que, n’étant rien que par vous, nous vivions selon vos désirs. Par Jésus‑Christ notre Seigneur.
Épître
Lecture de l’Épître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Romains. Chap. 8.
Mes Frères, nous ne sommes point les débiteurs de la chair, pour vivre selon la chair. Si vous vivez selon la chair, vous mourrez ; mais si vous mortifiez par l’esprit les œuvres de la chair, vous vivrez. Car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont enfants de Dieu. Vous n’avez point reçu en effet l’esprit de servitude pour être encore gouvernés par la crainte, mais vous avez reçu l’esprit de l’adoption des enfants, dans lequel nous crions : Abba ! c’est-à-dire, Père ! C’est l’Esprit qui rend lui-même témoignage à notre esprit que nous sommes fils de Dieu. Or, si nous sommes fils, nous sommes aussi héritiers, héritiers de Dieu, cohéritiers de Jésus-Christ.
Le Docteur des nations continue de former à la vie chrétienne les nouvelles recrues que sa voix puissante et celle de ses collègues dans l’apostolat, dispersés par le monde, amène chaque jour plus nombreuses aux fontaines du salut. Bien que se maintenant attentive aux événements qui se précipitent dans la Judée, l’Église, en effet, n’en réserve pas moins toujours ses sollicitudes les plus maternelles pour le grand œuvre de l’éducation des enfants qu’elle engendre à l’Époux. C’est ainsi que, pendant qu’Israël suit jusqu’au bout la voie fatale du reniement, une autre famille se forme et grandit qui prend sa place devant Dieu, et dédommage le Seigneur, par sa docilité, des amertumes dont l’abreuvèrent ses premiers fils. Les prétentions jalouses du peuple ancien, ces contradictions dont le Christ se plaint dans le Psaume (Psalm. 17, 44-46), n’ont point pris fin encore, et déjà l’Homme‑Dieu, grâce à l’Église, est devenu la tête des nations.
Rien n’égale la fécondité de l’Épouse, sinon la puissance de sanctification qu’elle déploie, au milieu d’éléments si divers, pour présenter dès les premiers jours à son Seigneur et roi un empire affermi dans l’unité de l’amour, une génération toute céleste et toute pure dans l’intelligence et la pratique parfaite des vertus. Assurément l’Esprit sanctificateur agit lui-même directement sur les âmes des nouveaux baptisés ; néanmoins, ineffable harmonie du plan divin ! depuis que le Verbe s’est fait chair et qu’il s’est associé dans l’œuvre du salut des hommes une Épouse toujours visible ici-bas, l’opération invisible de l’Esprit qui procède du Verbe n’arrive point à son terme normal sans la coopération et l’intervention extérieure de cette Épouse de l’Homme-Dieu. Non seulement l’Église est la dépositaire des formules toutes‑puissantes et des rites mystérieux qui font du cœur de l’homme une terre renouvelée, dégagée des ronces et prête à fructifier au centuple ; c’est elle encore qui, sous les mille formes de son enseignement, distribue la semence dans les sillons du Père de famille (s. Luc 8, 11). S’il revient à l’Esprit une admirable part dans cette fécondité et cette vie sociale de l’Église, son rôle près des élus considérés individuellement consiste surtout à faire valoir en eux les énergies divines des sacrements qu’elle confère, et à développer les germes de salut que sa parole dépose en leurs âmes.
Aussi sera-ce, dans tous les siècles, une mission importante et sublime que celle de ces hommes, chefs des églises particulières, docteurs privés ou directeurs des âmes, qui représenteront, près des fidèles isolés, la Mère commune ; ils fourniront véritablement pour elle à l’Esprit divin les éléments sur lesquels doit porter son action toute-puissante. Mais aussi, malheur au temps dans lequel les dispensateurs de la parole sainte ne laisseraient plus tomber sur les âmes, avec des principes diminués ou faussés, qu’une semence atrophiée ! l’Esprit n’est point tenu de suppléer par lui‑même à leur insuffisance ; et il ne le fera pas d’ordinaire, respectueux qu’il est de l’ordre établi par l’Homme-Dieu pour la sanctification des membres de son Église.
La Mère commune vient d’ailleurs magnifiquement à l’aide de ces délaissés dans sa Liturgie, qui renferme toujours, soutenues de la force même du Sacrifice et vivifiées par les grâces du Sacrement d’amour, la règle très sûre des mœurs et les plus sublimes leçons des vertus. Mais pour cela faut-il encore que ces pauvres âmes, trop habituées souvent à regarder comme la voie royale de la perfection la vie chétive qu’elles se sont faite, comprennent quelle place il convient de laisser au pain sans force et à l’eau appauvrie dont elles se nourrissent (Isaï. 3, 1 ; 30, 20), en présence des intarissables et authentiques trésors du sein maternel. « O vous tous qui avez soif, dirait le prophète, venez donc à la source vive. Pourquoi dépenser vos richesses à ce qui ne peut vous nourrir, et vos sueurs à ce qui ne peut vous rassasier ? Bien plutôt, sans argent ni dépense, sans échange d’aucune sorte, achetez et mangez, abreuvez-vous de vin et de lait : en m’écoutant, nourrissez-vous de la bonne nourriture, et que votre âme se délecte et s’engraisse (Isaï. 55, 1-2). » S’il est une remarque, en effet, qui doive attirer l’attention non moins que la reconnaissance du chrétien en quête de lumières au sujet de la voie qui conduit au ciel, c’est bien assurément que l’Église ait pris soin de choisir elle-même, au milieu du trésor des Écritures, et de rassembler dans le plus usuel de tous les livres les passages pratiques qu’elle sait mieux que personne sans doute convenir à ses fils. À cette école de la sainte Liturgie, de son livre de Messe, le fidèle humblement et pieusement attentif ne sera point exposé à voir s’affaiblir ou vaciller jamais la lumière. « C’est ici le chemin, lui dira son guide avec autorité ; prenez-le sans crainte, et ne vous écartez ni à droite, ni à gauche (Isaï. 30, 21). » L’Église, faut-il s’en étonner ? l’emportera toujours, dans la conduite des âmes, sur les plus profonds des docteurs et les plus saints mêmes de ses fils.
Qu’on réunisse les quelques lignes empruntées comme Épîtres, dans ces trois derniers dimanches, à la lettre de saint Paul aux Romains ; et qu’on dise si, indépendamment de leur infaillible vérité garantie par l’Esprit-Saint lui-même, il est possible de trouver ailleurs une aussi admirable exposition des bases de la morale révélée. La clarté, la simplicité d’expression, la véhémence chaleureuse de l’exhortation apostolique, le disputent, dans ce peu de paroles, à l’ampleur de la doctrine et à la portée des considérations que l’on y voit empruntées aux plus sublimes aspects du dogme chrétien. Jésus-Christ, fondement du salut, sa mort et son glorieux tombeau devenus dans le baptême le point de départ de l’homme régénéré, sa vie en Dieu modèle de la nôtre ; la honte passée de nos corps asservis, la fécondité sanctifiante des vertus remplaçant dans nos membres la désastreuse germination des vices ; aujourd’hui enfin les droits de l’esprit sur la chair, et ses devoirs contre elle s’il tient à garder sa juste prééminence, si l’homme veut maintenir la liberté qu’il a recouvrée par la grâce de l’Esprit d’amour et se montrer, comme il l’est en toute vérité, le fils de Dieu, le cohéritier du Christ : telles sont les splendides réalités illuminant pour nous désormais de leurs célestes rayons la loi de la vie dont on vit par l’Esprit-Saint dans le Christ Jésus (Rom. 8, 2) ; tels se produisent, en face du monde, les axiomes de la science du salut qui doit remplacer à la fois les impuissances de la loi juive et la stérile morale de la philosophie.
Car c’est une vérité qu’il convient de retenir aussi, comme étant l’idée-mère de toute cette sublime épître aux Romains : l’impuissance, la stérilité pour la justice complète et le bien absolu, sont la part trop certaine de l’humanité non relevée par la grâce. L’expérience l’a prouvé, saint Paul le déclare, les Pères bientôt l’affirmeront unanimement, et l’Église le définira dans ses conciles. L’homme peut arriver, il est vrai, par les seules forces de sa nature tombée, à la possession de certaines vérités et à la pratique de quelque bien ; mais il ne parviendra jamais, sans la grâce, à connaître et moins encore à observer les préceptes de la loi simplement naturelle dans leur ensemble.
De Jésus donc, de Jésus seul vient toute justice. Non seulement la justice surnaturelle, qui suppose l’infusion de la grâce sanctifiante dans l’âme du pécheur, est de lui tout entière ; mais encore cette justice naturelle dont les hommes se parent si volontiers, et qu’ils prétendent leur tenir lieu de tout le reste, échappe à quiconque n’adhère point au Christ par la foi et l’amour. Que les adeptes de l’indépendance de l’esprit humain exaltent leur morale et vantent leurs vertus ; nous chrétiens, nous ne savons qu’une chose que nous tenons de notre mère l’Église : l’honnête homme, c’est-à-dire l’homme véritablement en règle avec tous les devoirs que lui impose sa nature, ne se trouve point ici-bas sans le secours très spécial de l’Homme-Dieu rédempteur et sauveur. Avec saint Paul, soyons donc fiers de l’Évangile (Rom. 1, 16) ; car il est bien la vertu de Dieu, non seulement pour sauver l’homme et justifier l’impie (Ibid. 4, 5), mais encore pour donner la justice agissante et parfaite aux âmes avides de droiture. Le juste vit de la foi, dit l’Apôtre, et sa justice croît avec elle (Ibid. 1, 17) ; sans la foi en Jésus, la prétention d’arriver par soi et ses œuvres à la consommation de tout bien n’engendre que la stérilité de l’orgueil et n’attire que des maux (Ibid. 18).
Les Juifs en font aujourd’hui la triste expérience. Fiers de leur loi qui leur donnait une lumière plus grande qu’aux nations (Ibid. 2, 17-20), et voulant établir sur elle seule leur propre justice, ils ont méconnu celui qui était la fin de la loi, la source de toute justice véritable (Ibid. 10, 3-4) ; ils ont repoussé le Christ qui leur apportait, avec la délivrance du mal antérieur (Ibid. 3, 25), la connaissance du précepte et la force de l’accomplir (Ibid. 8, 3-4) ; ils sont restés dans leur iniquité, ajoutant faute sur faute au péché d’origine, thésaurisant pour le jour de colère (Ibid. 2, 5). Or voilà qu’à cette heure même s’accomplit la prédiction d’Isaïe, mettant les paroles suivantes dans la bouche des restes d’Israël que nous accompagnons aujourd’hui dans leur fuite : « Si le Seigneur des armées n’eût réservé quelques rejetons de notre race, nous aurions été comme Sodome et Gomorrhe (Isaï. 1, 9). »
« Que dirons-nous donc, s’écrie l’Apôtre (Rom. 9, 3o-33) ? sinon que les nations, qui ne cherchaient point la justice, ont trouvé et saisi la justice, mais la justice qui vient de la foi ; Israël au contraire, « poursuivant la loi de la justice, ne l’a point rencontrée. Pourquoi, cela ? parce qu’il n’a point voulu la tenir de la foi, et s’est conduit comme s’il pouvait l’obtenir par les œuvres. Ils ont bronché contre la pierre d’achoppement, selon qu’il est écrit : Voici que je pose en Sion une pierre d’achoppement et de scandale, et quiconque croira en celui qui est cette pierre ne sera point confondu (Isaï. 8, 14 ; 28, 16), »
Le Graduel semble exprimer les sentiments des chrétiens juifs contraints de quitter leurs villes, et priant Dieu d’être lui-même désormais leur protecteur et leur lieu de refuge. Le Verset chante de nouveau les grandeurs anciennes du Seigneur en Jérusalem et sur la montagne où fut son temple.
Graduel
Soyez mon Dieu protecteur et mon lieu de refuge, pour me sauver. V/. O Dieu, j’ai espéré en vous ; Seigneur, je ne serai point confondu pour jamais. Alléluia, alléluia. V/. Le Seigneur est grand et digne de toute louange dans la cité de notre Dieu, sur sa montagne sainte. Alléluia.
Évangile
La suite du saint Évangile selon saint Luc. Chap. XVI.
En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples cette parabole : Un homme riche avait un économe qui fut accusé devant lui comme ayant dissipé ses biens. L’appelant donc, il lui dit : Qu’est-ce que j’entends dire de vous ? Rendez compte de votre administration ; car désormais vous ne gérerez plus mon bien. Or l’économe se dit en lui-même : Que ferai-je, mon maître m’enlevant ainsi mon emploi ? Je ne puis travailler à la terre, j’aurais honte de mendier. Je sais ce que je ferai, afin que, lorsque j’aurai été dépouillé de cette administration, il y ait des gens qui me reçoivent dans leurs maisons. Appelant donc chacun des débiteurs de son maître, il dit au premier : Combien devez-vous à mon maître ? Il lui répondit : Cent barils d’huile. Prenez votre obligation, dit l’ économe, asseyez-vous vite, et écrivez cinquante. Ensuite il dit à un autre : Et vous, combien devez-vous ? Celui-ci répondit : Cent mesures de froment. Il lui dit : Voici votre lettre, écrivez quatre-vingts. Et le maître loua l’économe infidèle pour sa prudence ; car les enfants de ce siècle sont plus prudents que ne sont les enfants de lumière en leurs affaires. Et moi je vous dis : Faites-vous des amis avec les richesses d’iniquité, afin que, lorsque vous manquerez, ils vous reçoivent dans les demeures éternelles.
Les divers termes de la parabole qui nous est proposée sont faciles à saisir, et renferment une doctrine profonde. Dieu seul est riche par nature, parce qu’à lui seul appartient en propre le domaine direct et absolu sur toutes choses : elles sont à lui, parce qu’il les a faites (Psalm. 23, 2 ; 88, 12). Mais en envoyant son Fils dans le monde sous une forme créée, il l’a constitué par cette mission dans le temps l’héritier des ouvrages sortis de ses mains (Psalm. 8, 6-8), comme il l’était déjà des trésors mêmes de la nature divine par le fait de sa génération éternelle. L’homme riche de notre Évangile, c’est donc le Seigneur Jésus portant dans son humanité unie au Verbe le titre d’hérédité universelle (Héb. 1, 2 ; 2, 8) qui l’établit sur tous les biens, créés ou non, finis ou infinis, du Dieu très-haut. C’est à lui qu’appartiennent les cieux chantant sa gloire (Psalm. 18, 2, 6) et fiers de former pour un temps (Ps. 101, 27) son vêtement de lumière (Ps. 103, 2), l’océan qui proclame sa puissance au sein des tempêtes (Ps. 92, 4) et abat docile à ses pieds la fureur de ses flots (s. Marc 4, 39-40), la terre enfin lui présentant l’hommage de sa plénitude (Ps. 23, 1). L’herbe et les fleurs de la prairie, les fruits variés, la fertile beauté des champs (Ps. 49, 11), les oiseaux du ciel comme les poissons qui peuplent les fleuves ou parcourent les sentiers des mers (Ps. 8, 9), les grands troupeaux comme l’insecte ignoré, comme la bête fauve qui se dérobe dans la profondeur des forêts ou sur les montagnes (Ps. 49, 9-10) : tout est sien, tout est soumis à son empire. À lui aussi appartiennent en pleine possession l’argent et l’or (Agg. 2, 9), et l’homme même, qui ne serait que son esclave à jamais, s’il n’avait daigné miséricordieusement le diviniser et l’appeler en part de ses biens éternels.
Au lieu d’esclaves, il a voulu avoir en nous des frères ; et, retournant de ce monde à son Père devenu le nôtre par sa grâce (s. Jean 20, 17), il nous a envoyé l’Esprit-Saint comme le témoin de la filiation divine en nos âmes (Rom. 8, 10), comme le gage de l’hérédité sacrée qui nous assure le ciel (Éph. 1, 14). Biens ineffables du siècle futur, héritage sans pareil, dont la grandeur fait tressaillir l’Homme-Dieu lui-même dans le psaume célébrant sa résurrection glorieuse ! Nous ses membres et ses cohéritiers, nous avons le droit de dire avec lui : « Le cordeau du partage est tombé pour moi sur une part merveilleuse. Splendide est en effet mon héritage ; car c’est Dieu même qui m’est échu en possession. Béni soit le Seigneur qui m’a donné de le comprendre (Psalm. 15, 5-7) ! »
Toutefois, pour arriver à la jouissance des richesses éternelles, une épreuve nous est imposée : il faut que nous fassions valoir ici‑bas le domaine visible du Christ. Notre fidélité dans la gestion de ces biens inférieurs, confiés en des proportions si variées aux soins des fils d’Adam pendant les jours de leur exil, marquera la mesure des récompenses sans fin qui nous attendent. Divine convention, ineffable accord de justice et d’amour ! de ses biens l’Homme-Dieu a fait deux parts : il nous assure la pleine propriété de la part éternelle, seule vraiment grande, seule capable de satisfaire nos aspirations infinies ; pour l’autre, qui en elle-même ne mériterait point d’attirer le regard d’êtres appelés à contempler la divine essence, il dédaigne d’y attacher nos âmes et se refuse à nous communiquer sur elle les droits d’un domaine absolu. La vraie propriété des biens du temps reste donc à lui seul ; la possession qu’il octroie des richesses de la terre d’épreuve aux futurs cohéritiers de son éternité, demeure soumise à mille restrictions durant leur vie, et révèle à la mort son caractère essentiellement précaire : elle ne suit point les hommes au delà du tombeau.
Un jour vient pour l’insensé, comme pour le sage, où l’on doit lui redemander son âme (s. Luc 12, 20), où le riche, traduit comme le pauvre dans la nudité du jour de sa naissance (Job. 1, 21) en présence du seul Maître, entendra la parole : Rendez-moi compte de votre administration. La règle du jugement, à cette heure terrible, sera celle-là même que nous a révélée le Seigneur en personne, lorsqu’il disait dans les jours de sa vie mortelle : « Il sera réclamé beaucoup à qui l’on a donné beaucoup ; et il sera demandé plus à qui l’on aura confié davantage (s. Luc 12, 48). » Malheur alors au serviteur qui s’était cru maître, à l’économe qui, méconnaissant son mandat, s’est plu à dissiper vainement des biens dont il n’était que le dispensateur (Ibid. 42) ! Il comprend, à la lumière de l’éternité, l’erreur de son fol orgueil ; il pénètre l’injustice souveraine d’une vie, honnête peut-être selon le monde, mais passée tout entière sans tenir compte des intentions de celui qui lui confia ces richesses dont il était si fier. Dépossédé sans retour, il ne peut réparer ses torts par une administration plus conforme à l’avenir aux volontés du maître du monde. S’il pouvait du moins se reformer laborieusement un héritage, ou trouver assistance près de ceux qui vécurent avec lui sur terre ! Mais au delà du temps le travail cesse ; et ses mains vides, devenues impuissantes, ne recueilleraient que la honte en s’ouvrant pour demander l’aumône, au pied du tribunal redoutable où chacun craint à bon droit de ne pouvoir se suffire à lui-même (s. Matth. 25, 9).
Heureux donc si, dès ce monde, la voix des menaces divines qui retentit en mille manières (Psalm. 94, 8) parvient à réveiller sa conscience ; si, comme l’économe de notre Évangile, il profite du temps qui lui reste, et se dit avec Job : Que ferai-je, quand Dieu se lèvera pour le jugement ? Lorsqu’il m’interrogera, que lui répondrai-je (Job. 31, 14) ?
Celui même qui doit être son juge lui indique miséricordieusement, aujourd’hui, le moyen de parer la peine qu’ont encourue ses malversations. Qu’il imite l’habileté de l’économe infidèle, et il sera loué pleinement : non seulement, comme lui, à cause de sa prudence ; mais parce qu’en disposant ainsi pour les serviteurs de Dieu des richesses mises en ses mains, loin de frustrer le Seigneur de toutes choses, il ne fait que rentrer dans ses intentions. Quel est en effet l’économe fidèle autant que prudent, établi par le Seigneur sur sa famille, sinon celui qui pourvoie les membres de cette famille, en temps opportun, de froment (s. Luc 12, 42) et d’huile (2 Esdr. 5, 11) ? Corporelle ou spirituelle, l’aumône nous assure des amitiés puissantes pour l’heure du grand dénuement, au jour où la terre doit manquer à notre vie défaillante ; car c’est aux pauvres qu’appartient le royaume des cieux (s. Matth. 5, 3) ; si nous employons les richesses de la vie présente à abriter et soulager leur misère ici‑bas, ils ne manqueront pas de nous recevoir à leur tour dans leurs maisons, qui sont les tabernacles éternels.
Tel est le sens direct et obvie de la parabole qui nous est proposée. Mais si nous voulons pénétrer complètement l’intention pour laquelle l’Église choisit aujourd’hui ce passage de l’Évangile, il nous faut recourir à saint Jérôme qui s’en est fait l’interprète officiel dans l’Homélie de l’Office de la nuit. Poursuivons avec lui la lecture évangélique : Celui qui est fidèle dans les petites choses, continue le texte sacré, c’est aussi dans les grandes, et celui qui est injuste dans les petites choses le sera dans les grandes ; si donc vous n’avez pas été fidèles dans les richesses iniques et trompeuses, qui vous confiera les biens véritables (s. Luc 16, 10-11) ? Or Jésus parlait ainsi, observe saint Jérôme, devant les scribes et les pharisiens qui le tournaient en dérision, voyant bien que la parabole était contre eux. L’infidèle dans les petites choses, c’est en effet le Juif jaloux, qui, dans le domaine restreint de la vie présente, refuse à ses frères l’usage des biens créés pour tous. Si donc, est-il dit à ces scribes avares, vous êtes convaincus de malversation dans la gestion de richesses fragiles et passagères, qui pourrait vous confier les vraies, les éternelles richesses de la parole divine et de l’enseignement des nations (Hier Ep. ad Algasiam, cap. 6) ? Demande redoutable, que le Seigneur laisse aujourd’hui en suspens sur la tête des infidèles dépositaires de la loi des figures. Mais combien, dans peu, la réponse sera terrifiante !
En attendant, l’humble troupe des élus de Juda, laissant ces endurcis à la vengeance que précipite leur démence orgueilleuse, poursuit sa route dans la confiance assurée qu’elle garde en son sein les promesses de Sion. L’Antienne de l’Offertoire célèbre sa foi et son espérance.
Offertoire
Vous sauverez, Seigneur, le peuple qui marche dans l’humilité, et vous humilierez les yeux des superbes ; car quel autre Dieu y a-t-il que vous, Seigneur?
C’est de Dieu lui-même que nous tenons les dons qu’il agrée de nos mains dans sa bonté ; les Mystères sacrés qui transforment l’oblation n’en obtiennent pas moins pour nous par sa grâce, comme le dit la Secrète, la sanctification de la vie présente et les joies de l’éternité.
Secrète
Recevez de nos mains, nous vous en supplions, Seigneur, ces dons que nous tenons de votre bonté, afin que ces sacrés Mystères, par la vertu de votre grâce, sanctifient nos voies dans la vie présente et nous conduisent aux joies éternelles. Par notre Seigneur.
L’espérance que l’homme met en Dieu ne saurait le tromper ; il en a pour gage la suavité du banquet divin.
Communion
Goûtez et voyez combien le Seigneur est doux ; heureux l’homme qui espère en lui !
L’aliment céleste a la vertu de renouveler et nos âmes et nos corps ; obtenons d’éprouver la plénitude de ses divins effets.
Postcommunion
Que le céleste Mystère soit pour nous, Seigneur, le renouvellement de l’âme et du corps, en sorte que nous ressentions l’effet de sa célébration que nous venons d’accomplir. Par Jésus-Christ notre Seigneur.
À Vêpres
Antienne de Magnificat
Que ferai-je, mon maître m’ôtant l’administration de son bien ? Je ne puis travailler à la terre, j’aurais honte de mendier. Je sais ce que je ferai, afin que, lorsque j’aurai été dépouillé de cette administration, il y ait des gens qui me reçoivent dans leurs maisons.
Autres liturgies
Unissons-nous à l’Église, en redisant ces Répons de l’Office du Temps, auxquels nous joindrons la belle Oraison qui les suit, et qui est en usage au Missel ambrosien pour plusieurs des Dimanches après la Pentecôte.
Répons
R/. Seigneur, vous avez exaucé la prière que votre serviteur vous faisait, pour que je bâtisse un temple à votre Nom : * Bénissez et sanctifiez cette maison à jamais, Dieu d’Israël.
V/. Seigneur qui gardez l’alliance promise à vos serviteurs marchant de tout leur cœur en votre présence. * Bénissez.
R/. Seigneur, écoutez mes chants et la prière que votre serviteur formule aujourd’hui devant vous : que vos yeux soient ouverts et vos oreilles attentives : * Sur cette maison jour et nuit.
V/. Regardez, Seigneur, de votre sanctuaire et de votre demeure au plus haut des cieux, * Sur cette maison.
R/. Seigneur, si votre peuple se tourne et prie vers ce sanctuaire : * Vous l’exaucerez du ciel, et vous le délivrerez des mains de ses ennemis.
V/. Si votre peuple pèche contre vous, et que se convertissant il fasse pénitence et vienne prier en ce lieu, * Vous l’exaucerez.
Gloire au Père. * Vous l’exaucerez.
Oraison
Seigneur, exaucez la voix de votre Église en ses supplications : vigne mystique, accrue par les ouvriers de votre Fils, elle veut affermir en vous ses racines ; étrangère aux fluctuations de ce siècle, enrichie des rejetons de ce peuple auquel elle a donné naissance, qu’elle ait à tirer gloire des fruits de sa fertilité. Par le même Jésus-Christ notre Seigneur.
L’ancienne Préface de l’Église Romaine pour ce jour était ainsi conçue.
Préface
Il est vraiment digne de vous rendre grâces, Dieu éternel, en même temps que de vous dédier le sacrifice d’un cœur contrit, de vous immoler la victime d’une âme humiliée ; car c’est de vous que nous recevons tous les biens, c’est en vous que nous puisons toute joie. Faites donc, nous vous en prions, que vous serve notre conscience, que de jour en jour meilleure elle profite en vous, qu’elle soit soumise dans une pureté parfaite à votre grâce. Seigneur, c’est notre prière, faites en nous le vide de tous maux et remplissez-nous totalement de vos biens, afin que par cette grâce que vous nous donnerez, qui n’est point due à nos mérites, nous soyons délivrés de toute adversité, confirmés en tous biens, et méritions d’être admis parmi les habitants des cieux.