3 janvier Sainte Geneviève, vierge, patronne de Paris

Dom Guéranger ~ L’Année liturgique
3 janvier, Sainte Geneviève, vierge, patronne de Paris

Le martyrologe de l’Église romaine nous présente aujourd’hui le nom d’une sainte vierge dont la mémoire est trop chère à l’Église de Paris, et à toutes celles de la France entière, pour qu’il nous soit possible de passer sous silence ses glorieux mérites. Dans la compagnie des martyrs, et du confesseur et pontife Silvestre, la vierge Geneviève brille d’un doux éclat à côte de la veuve Anastasie. Elle garde avec amour le berceau de l’Enfant divin dont elle imita la simplicité, et dont elle a mérité d’être l’épouse. Au milieu des mystères de l’enfantement virginal, il est juste de rendre de solennels honneurs aux vierges fidèles qui sont venues après Marie. S’il nous était possible d’épuiser les fastes de la sainte Église, quelle magnifique pléiade d’épouses du Christ n’aurions-nous pas à glorifier, dans ces quarante jours de la naissance de l’Emmanuel !

Déjà nous avons nommé la grande martyre Eugénie ; nous aimerions à célébrer Colombe de Sens, Euphrosyne d’Alexandrie, Emilienne de Rome, Macra de Reims, Synclétique d’Alexandrie, Véronique de Binasco, Brigitte d’Ecosse, Viridiana de Vallom­breuse, et tant d’autres ; mais les bornes de notre plan nous contraignent à ne dépasser que rarement les limites tracées par le cycle lui-même. Toutefois, empruntant les belles paroles de saint Augustin dans son huitième sermon pour la fête de Noël, nous dirons à toutes ces amantes du Dieu nouveau-né : « Saintes Vierges, qui avez méprisé les noces terrestres, célébrez avec allégresse l’enfantement de la Vierge. Celui qui vient combler vos désirs n’a point enlevé à sa Mère cette pureté que vous aimez. Il a guéri en vous la blessure que vous aviez contractée par Ève : il ne pouvait altérer ce qui vous plaît en Marie. Mais ce Fils que vous n’avez pu, comme elle, enfanter selon la chair, vous l’avez senti votre Époux dans votre cœur. Vous n’avez pas été stériles ; car la pureté de la chair est le principe de la fécondité de l’âme. »

Geneviève a été célèbre dans le monde entier. Elle vivait encore en cette chair mortelle, que déjà l’Orient connaissait son nom et ses vertus ; du haut de sa colonne, le stylite Siméon la saluait comme sa sœur dans la perfection du christianisme. La capitale de la France lui est confiée ; une simple bergère protège les destinées de Paris, comme un pauvre laboureur, saint Isidore, veille sur la capitale des Espagnes.

L’élection que le Christ avait daigné faire de la jeune fille de Nanterre pour son épouse, fut déclarée par l’un des plus grands évêques de la Gaule au Ve siècle. Saint Germain d’Auxerre se rendait dans la Grande-Bretagne où le pape saint Boniface Ier l’envoyait pour combattre l’hérésie pélagienne. Accompagné de saint Loup, évoque de Troyes, qui devait partager sa mission, il s’arrêta au village de Nanterre ; et comme les deux prélats se dirigeaient vers l’église où ils voulaient prier pour le succès de leur voyage, le peuple fidèle les entourait avec une pieuse curiosité. Éclairé d’une lumière divine, Germain discerna dans la foule une petite fille de sept ans, et il fut averti intérieurement que le Seigneur se l’était choisie. Il demanda aux assistants le nom de cette enfant, et pria qu’on l’amenât en sa présence. On fit donc approcher les parents, le père nommé Sévère et la mère appelée Geruntia. L’un et l’autre furent attendris à la vue des caresses dont le saint évêque comblait leur fille. — « Cette enfant est à vous ? » leur dit Germain. — « Oui, seigneur, » répondirent-ils. — « Heu­reux parents d’une telle fille ! » reprit l’évoque. « À la naissance de cette enfant, sachez-le, les anges ont fait grande fête dans le ciel. Cette fille sera grande devant le Seigneur et, par la sainteté de sa vie, elle arrachera beaucoup d’âmes au joug du péché. » Puis, se tournant vers l’enfant : « Geneviève, ma fille ? » lui dit-il. — « Père saint, répondit-elle, votre servante écoute. » Alors, Germain : « Parle-moi sans crainte : voudrais-tu être consacrée au Christ dans une pureté sans tache, comme son épouse ? — « Béni soyez-vous, mon Père ! » s’écria l’enfant ; « ce que vous me demandez est le plus cher désir de mon cœur. C’est tout ce que je veux ; daignez prier le Seigneur qu’il me l’accorde. » — « Aie confiance, ma fille, » reprit Germain ; « sois ferme dans ta résolution ; que tes œuvres soient d’accord avec ta foi, et le Seigneur ajoutera sa force à ta beauté. »

Les deux évêques accompagnés du peuple entrèrent dans l’église, et l’on chanta l’office de none, qui fut suivi des vêpres. Germain avait fait amener Geneviève auprès de lui, et durant toute la psalmodie il tint ses mains imposées sur la tête de l’enfant. Le lendemain, au lever du jour, avant de se mettre en route, il se fit amener Gene­viève par son père. « Salut, Geneviève, ma fille ! » lui dit-il ; « te souviens-tu de la promesse d’hier ? » — « Ô Père saint ! » reprit l’enfant, « je me souviens de ce que j’ai promis à vous et à Dieu ; mon désir est de garder à jamais, avec le secours céleste, la pureté de mon âme et de mon corps. » À ce moment, Germain aperçut à terre une médaille de cuivre marquée de l’image de la Croix. Il la releva, et, la présentant à Geneviève, il lui dit : « Perce-la, mets-la à ton cou, et garde-la en souvenir de moi. Ne porte jamais ni collier, ni bague d’or ou d’argent, ni pierre précieuse ; car si l’attrait des beautés terrestres venait à dominer ton cœur, tu perdrais bientôt ta parure céleste qui doit être éternelle. » Après ces paroles, Germain dit à l’enfant de penser souvent à lui dans le Christ, et l’ayant recommandée à Sévère comme un dépôt deux fois précieux, il se mit en route pour la Grande-Bretagne avec son pieux compagnon.

Nous nous sommes complu à retracer cette gracieuse scène, telle qu’elle est racontée dans les Actes des saints, dans le but de montrer la puissance de l’Enfant de Bethléhem, qui agit avec tant de liberté dans le choix des âmes qu’il a résolu de s’attacher par un lien plus étroit. Il s’y conduit en maître, rien ne lui fait obstacle, et son action n’est pas moins visible en ce siècle de décadence et d’attiédissement qu’aux jours de saint Germain et de sainte Geneviève. Quelques-uns, hélas ! s’en irritent ; d’autres s’étonnent ; la plupart ne réfléchissent pas : les uns et les autres sont cependant en face d’un des signes les plus frappants de la divinité de l’Église.

Nous donnerons ici la leçon que le bréviaire de Paris de 1680 a consacrée à sainte Geneviève, et qui a été conservée dans les éditions suivantes.

Lecture de matines

Geneviève, née à Nanterre, au territoire de Paris, fille de Sévère et de Géruntia, fit briller dès ses plus tendres années l’éclat d’une rare vertu. L’évêque Germain d’Auxerre, allant en Bretagne avec Loup de Troyes, pour extirper les restes de l’hérésie Pélagienne, ayant aperçu Geneviève, reconnut et prophétisa qu’elle serait agréable à Dieu et illustre par la sainteté de sa vie. Lui ayant demandé si elle voulait consacrer à Dieu sa virginité, Geneviève répondit avec un visage plein de modestie qu’elle le désirait vivement et uniquement. Germain entrant donc dans l’Église, avec un nombreux cortège de peuple, imposa les mains à la jeune fille et la consacra vierge, au milieu du chant des psaumes et des plus solennelles oraisons. Le lendemain, lui ayant demandé si elle se souvenait encore du vœu qu’elle avait fait, elle l’assura qu’elle s’en souvenait, et qu’avec l’aide de Dieu elle persévérerait dans son propos. Alors, l’évêque aperçut à ses pieds, non sans une volonté de Dieu, une pièce de cuivre marquée d’une croix ; il la ramassa, la donna à la vierge, et lui ordonna de la porter à son cou, et de ne plus désormais souffrir la parure d’un collier qui ne sied point à une Épouse du Christ.

Elle excella par le don et l’abondance des miracles, surtout à l’égard des énergumènes qu’elle délivrait de la tyrannie des démons, en les oignant d’une huile bénite. Elle fit plusieurs prophéties, entre autres à l’approche d’Attila, roi des Huns. Elle exhorta les habitants de Paris à ne point abandonner leurs foyers, et à ne pas transporter ailleurs leurs biens, promettant que la ville tiendrait debout, tandis que d’autres cités plus fortes étaient renversées. L’événement prouva la vérité de la promesse ; et on l’attribua à la protection de Geneviève. Pendant une famine, et dans une grande cherté de vivres, elle fournit à la ville une grande quantité de blé, et distribua des pains à d’innombrables pauvres. Toutefois, malgré tant de miracles, elle ne put échapper à la haine et aux insultes des malveillants. Germain, se rendant une seconde fois en Bretagne, l’alla trouver, et par ses divines paroles la consola de toutes ces calomnies ; puis, adressant au peuple une grave remontrance, il fit voir le grand mérite de Geneviève devant Dieu, et montra le lieu où elle répandait ses prières, tout arrosé de ses larmes.

De la quinzième à la cinquantième année de son âge, elle ne rompit le jeûne que le dimanche et le jeudi, par un peu de pain d’orge et quelques mets cuits quinze jours à l’avance, afin qu’ils fussent moins succulents : sans autre breuvage que l’eau fraîche. Après ce temps, à la persuasion des Évêques, auxquels elle eût jugé un grand crime de ne pas obéir, elle usa de petits poissons et de lait. Une si grande vertu ne put être longtemps sans franchir les limites de la Gaule. Siméon le Stylite, ayant ouï le bruit de ses miracles, voulut se recommander à ses prières. Enfin ses admirables vertus, comme l’écrit Bède, éclatèrent au loin, et elle vieillit dans le service du Christ jusqu’à l’âge de quatre-vingts ans. Grégoire de Tours dit encore d’elle : « Sainte Geneviève qui, dans son corps mortel, fut si puissante qu’elle ressuscita un mort, fut ensevelie à Paris dans la basilique des saints Apôtres Pierre et Paul ; les prières faites à son tombeau obtiennent souvent d’être exaucées ; et surtout les fièvres les plus opiniâtres cèdent souvent à la vertu de son intercession ».

Nous donnons ici un chœur de gracieuses antiennes extraites des anciens livres d’offices de l’Église de Paris. Ces chants antiques sont purs et naïfs comme la vie de l’humble et sainte bergère.

Antienne

La vierge Geneviève, lorsqu’elle était encore jeune, ne fit cependant rien paraître de puéril dans ses actions ; mais, pour trouver la solitude, elle fuyait la compagnie des hommes.

Le Seigneur la prit pour lui dès l’enfance, et il parla à son cœur.

Au dehors, elle paissait les brebis de son père ; mais au dedans, le Seigneur était son pasteur.

Elle trouva un grand repos dans la garde de son troupeau ; et la solitude de son cœur était comme un jardin de délices devant Dieu.

Félicitez-moi, vous tous qui aimez le Seigneur, de ce qu’étant petite, j’ai plu au Très-Haut.

Depuis que le saint Pontife m’a donné une pierre céleste, je me suis délectée en Jésus-Christ seul, comme en la plénitude des richesses.

J’ai servi le Seigneur dans la simplicité de mon cœur, lorsque je gardais les brebis du pâturage de mon père.

Ô heureuse servante de Dieu ! déchargez-nous du poids qui nous accable, et dépouillez-nous de ces fautes mortelles qui nous fatiguent, afin que, par vos supplications, la porte du ciel nous soit ouverte.

Ô miséricordieuse Épouse de Dieu ! qui êtes l’aurore du jour pour les cœurs tristes : vierge fille de France, vierge pleine de douceur, écoutez ceux qui crient vers vous, ne méprisez point leurs prières.

Geneviève, vierge clémente, regardez ceux qui vous implorent, enlevez le fardeau de nos fautes, repoussez nos ennemis, rendez la santé à notre corps malade et à notre cœur gémissant.

Ô Geneviève ! regardez-nous d’un œil de bonté ; vous qui participez à la lumière angélique, qui brillez d’un titre céleste, qui êtes en présence du souverain Roi, réconciliez-nous avec lui ; donnez-nous de jouir de votre Époux, vous qui êtes l’Épouse et la fille de l’Époux.

Voici maintenant quelques répons empruntés à la même liturgie. Le premier est imité du beau répons de Fulbert pour la Nativité de la sainte Vierge : Stirps Jesse, etc.

Répons

R/. Une fleur distillant la rosée est descendue pour la gloire de la cité ; * Et sur cette fleur, Dieu a inspiré un parfum. V/. La fleur, c’est la vierge ; la rosée, c’est l’heureuse guérison ; le parfum, c’est le souffle du salut. * Et sur cette fleur, Dieu a inspiré un parfum.

R/. L’Ange du Seigneur est descendu du ciel, et s’approchant du saint Prélat, lui a donné une pierre céleste, qu’il a pendue à mon cou, disant : Reçois ce gage, ma très chère fille, et ne donne accès à nul amant, si ce n’est * Le Seigneur Jésus-Christ, V/. Je donnerai au vainqueur une pierre blanche, et sur cette pierre sera écrit un nom nouveau que nul ne connaît, sinon celui qui aime * Le Seigneur Jésus-Christ.

R/. Le Seigneur a inventé de nouveaux combats ; une femme craignant Dieu garde la cité ; * Et tandis que la vierge combattait seule, les étoiles combattirent contre Attila, V/. Par la foi d’une seule, tous ont été rendus courageux dans la guerre, et ont renversé le camp des étrangers. * Et tandis que la vierge combattait seule, les étoiles combattirent contre Attila.

R/. Cette vierge pauvre sera bénie du Seigneur ; car elle a donné de ses pains au pauvre. * Et, par ses mérites, nos vallées ont abondé en froment, V/. Grâces nous vous rendons, Seigneur, de ce que, par votre servante, nos campagnes ont été remplies de fertilité. * Et par ses mérites nos vallées ont abondé en froment.

R/. Geneviève a été agrandie par l’éclat de ses merveilles ; * Et elle s’est acquis une grande gloire en vivant au milieu de son peuple. V/. Elle a guéri sa nation et l’a délivrée de douleurs enflammées. * Et elle s’est acquis une grande gloire en vivant au milieu de son peuple.

R/. Le Seigneur a élevé la jeune fille humble et pauvre sur la Montagne sainte, au milieu de l’Université, pour confondre la sagesse du monde, * Et pour apprendre à tous que la sagesse du siècle est folie devant Dieu. V/. Dieu a choisi ce qu’il y a de faible dans le monde, pour confondre ce qui est fort. * Et pour apprendre à tous que la sagesse du siècle est folie devant Dieu.

Il est juste de faire entendre ici la voix d’Adam de Saint-Victor, à qui appartient de droit l’honneur de chanter la noble vierge, patronne de l’Église de Paris, qui fut redevable à ce grand poète d’une si riche collection d’admirables séquences.

Séquence

De Geneviève la fête solennelle nous amène une solennelle joie.

Que la pureté du cœur éclate en un sacrifice de louange.

Heureuse fut la naissance de cette enfant, témoin le Pontife Germain.

Ce qu’il prévit en esprit est justifié par l’événement.

Sur la poitrine de la vierge, pour indice de pudeur,

Il suspend une médaille d’airain marquée du signe de la croix.

À Geneviève, il offre une dot venue de la main de Dieu,

La consacrant comme un temple du Saint-Esprit, sous l’alliance du Christ.

La mère de cette innocente enfant ose la frapper : elle est privée de la lumière.

Compatissant à sa mère, la vierge lui rend l’usage de la vue.

Geneviève au grand cœur, mortifie sa chair par le jeûne ; elle arrose la terre de ses larmes, et se réjouit dans un continuel martyre.

Sur les pas du céleste guide, elle parcourt les cieux et les enfers ; par l’ardeur de ses prières, elle sauve sa ville de l’invasion d’un peuple barbare.

Par un prodige divin, elle apaise longtemps la soif des travailleurs. Elle rend à une mère désolée son fils unique, qu’une chute a brisé.

À peine la vierge a-t-elle prié, les démons frémissent, la paix est rendue aux énergumènes, l’espoir aux infirmes, le pardon aux coupables.

En sa main, des flambeaux se rallument d’une manière céleste ; par elle, un fleuve au vaste lit rentre docilement dans ses rives.

Après sa mort, vivant encore par ses mérites, elle calme les ardeurs du feu sacré ;

Elle qui, dans ce monde, avait vaincu en elle-même les feux de la concupiscence.

La mort, les maladies, les démons, les éléments, obéissent à ses ordres.

Ainsi Geneviève, par ses prières, domine les lois de la nature.

Ainsi la vertu du Christ opère de grandes choses dans les plus petites.

Au Christ donc pour tant de merveilles, louange assidue, gloire éternelle !

Amen.

Vierge fidèle, ô Geneviève ! nous vous rendons gloire pour les mérites que le divin Enfant s’est plu à réunir en vous. Vous avez apparu sur notre patrie comme un Ange tutélaire ; vos prières ont été longtemps l’objet de la confiance des Français ; et vous vous êtes fait gloire, au ciel et sur la terre, de protéger la capitale du royaume de Clovis, de Charlemagne et de saint Louis. Des temps dignes d’exécration sont venus, durant lesquels votre culte a été sacrilègement abrogé, vos temples fermés, vos précieuses reliques profanées. Cependant, vous ne nous avez pas abandonnés ; vous avez imploré pour nous des jours meilleurs ; et nous pouvons reprendre quelque confiance, quand nous voyons votre culte refleurir parmi nous, malgré des profanations plus récentes ajoutées aux anciennes.

En cette époque de l’année qu’embellit et consacre votre nom, bénissez le peuple chrétien. Ouvrez nos cœurs à l’intelligence du mystère de la Crèche. Retrempez cette nation qui vous est toujours chère aux pures sources de la foi, et obtenez de l’Emmanuel que sa naissance, renouvelée chaque année, devienne enfin une époque de salut et de vraie régénération. Nous sommes malades, nous périssons, parce que les vérités sont diminuées chez nous, selon la parole de David ; et la vérité s’est obscurcie, parce que l’orgueil a pris la place de la foi, l’indifférence celle de l’amour. Jésus connu et aimé dans le mystère de son ineffable Incarnation peut seul nous rendre la vie et la lumière. Vous qui l’avez reçu, qui l’avez aimé, durant votre longue vie si pure, menez-nous à son berceau.

Veillez, ô puissante bergère, sur la ville qui vous est confiée. Gardez-la des excès qui semblent quelquefois la rendre semblable à une grande cité païenne. Dissipez les tempêtes qui se forment dans son sein ; d’apôtre de l’erreur, qu’elle consente enfin à devenir disciple de la vérité. Nourrissez encore son peuple qui meurt de faim ; mais soulagez surtout ses misères morales. Calmez ces fièvres ardentes qui brûlent les âmes, et sont plus terribles encore que ce mal dévorant qui ne brûlait que les corps. Près de votre sépulcre vide, du haut de la Montagne que domine le vaste temple qui s’élève sous votre nom et reste vôtre de par l’Église et nos pères, en dépit des entreprises répétées de la force brutale, veillez sur cette jeunesse de France qui se presse autour des chaires de la science humaine, jeunesse si souvent trahie par les enseignements mêmes qui devraient la diriger, et assurer à la patrie des générations chrétiennes. La croix brille toujours, malgré l’enfer, sur la coupole de votre sanctuaire profané ; ne permettez pas qu’elle en soit descendue. Que bientôt cette croix immortelle règne de nouveau pleinement sur nous ; qu’elle plane du sommet de votre temple sur toutes les habitations de la cité maîtresse, rendue à son antique foi, à votre culte, à votre ancienne protection.